vendredi 27 juin 2014

COMMENT OBTENIR L'UNION ?

Article paru dans : Kapitalis

GHANNOUCHI PEUT DIRE MERCI A L'OPPOSITION TUNISIENNE !
Partout ailleurs les frères musulmans sont écartés du pouvoir s'ils ne sont pas mis à l'indexe de certains pays pour cause de terrorisme, sauf en Tunisie où le frère Ghannouchi est au cœur du pouvoir grâce à une opposition molle, véritable boulet pour les tunisiens !
Il est devenu clair que, grâce à la division des partis progressistes, les islamistes ont obtenu ce qu'ils voulaient, c'est-à-dire un régime parlementaire, une limitation des pouvoirs du président, mais surtout que les élections législatives se passent avant la présidentielle.

Un article de Nizar Bahoul qui fait une analyse très claire du jeu politique d'Ennahdha et un autre tout aussi clair, me conduisent à réagir et à alerter les politiques (mais je ne crois pas beaucoup en eux) et surtout la société civile tunisienne qui a été le moteur des seules évolutions positives que l’on a pu constater.

Dans son article, Nizar Bahoul montre d’abord que grâce à la division des partis progressistes, les islamistes ont obtenu ce qu’ils voulaient :
- un régime parlementaire et un affaiblissement des pouvoirs du président,
- mais surtout que les élections législatives se passent avant la présidentielle.

Est-ce innocent ? Bien sûr que non et cela devrait être évident pour tout le monde. En mettant les législatives avant la présidentielle, les islamistes comptent sur la division des partis progressistes, sur leur émiettement; alors qu’eux-mêmes seront unis et que leurs électeurs se mobiliseront.
On voit déjà que Nida Tounes veut aller à la bataille seul, sans ses associés.

Ce pari des islamistes est donc très intelligent et, quoiqu'il arrive, les islamistes devraient en sortir gagnants. 
Ou bien ils obtiendront une majorité : soit seuls (c’est peu probable), soit avec une alliance comme la dernière fois ! Car Ghannouchi saura trouver d'autres ambitieux pour remplacer Moncef Marzouki et Mustapha Ben Jaafar qu'il a su tirer vers lui pour mieux les étouffer. 
C’est là une hypothèse beaucoup plus sérieuse, puisque l'opposition dans son ensemble a tout fait pour maintenir dans le jeu politique Ghannouchi et son parti, considérant Ennahdha incontournable et indispensable à la vie démocratique tunisienne, malgré tous les crimes politiques qu'elle a cumulés en si peu de temps au pouvoir ! Et ce, contre la volonté des tunisiens qui n'ont eu de cesse de réclamer l'élimination des Frères musulmans de la scène politique pour cause de fascisme et de terrorisme !! 

Et voilà comment les tunisiens repartiront pour un tour avec à la clé la régression et l’islamisation rampante du pays, à cause d'une opposition sourde à leurs réclamations.
C'est à dire, une impossibilité d'assurer la sécurité et donc la continuation de la crise économique, l'absence d'investissements, la corruption endémique et toujours cette islamisation régressive.

Ou bien ils resteront minoritaires mais on aura, en face, une assemblée avec de multiples partis et la nécessité de coalition qui se feront et se déferont selon les desiderata de Ghannouchi, champion dans la manipulation et la corruption des hommes politiques; et qui paralyseront le pays comme ils l'ont déjà fait en trois années de troïka dominée par Ennahdha !

Est-ce vraiment le moment d’avoir un pouvoir divisé, sans projet commun, à la merci du chantage des uns et des autres ?  Alors que le pays se doit d’avoir une politique ferme et novatrice pour faire progresser la situation, on se trouvera en présence d’un pouvoir impuissant, contraint de tergiverser des mois et des mois pour obtenir ce fameux consensus, qui n'est que le choix inefficace entre deux thèses incompatibles; avec à la clef au mieux des demi-mesures, là où il faudrait une ligne claire. Ce sera des délais sans fin, pour faire la moindre réforme. C’est très grave.

On peut admettre qu'il y ait deux groupes de partis : d'un côté la droite et le centre droit et d'un autre la gauche et l'extrême gauche mais c'est la seule division qui a, quelques raisons d'exister, même si, de mon point de vue elle aurait pu attendre pour exister pleinement que les islamistes soient mis hors d'état de nuire. Toutes les autres divisions sont factices et ne sont que l'expression de petites ambitions personnelles qui poussent des politiciens sans scrupules et sans envergure à vouloir exister au risque de compromettre l'avenir du pays.

Si l’opposition progressiste est à ce point impuissante à se réunir sur un socle commun qui existe, pour battre les islamistes; alors il est indispensable et urgent que la société civile réagisse avec force car c’est la dernière chance pour le pays.

Comment peut-elle faire ? Elle doit adresser un message clair aux partis progressistes sous forme d’un ultimatum :
- Ou bien vous vous unissez avec un programme commun, sur des bases qui peuvent faire consensus, la priorité étant de battre les islamistes et de les mettre hors d’état de nuire; et vous présentez des candidats communs.
- Ou bien vous allez à la bataille en ordre dispersé et dans cette hypothèse la société civile ne veut pas participer à cette mascarade dangereuse et boycottera fermement ces élections. Les islamistes, dans ce cas, l’emporteront ! Mais ils l’emporteront de toute façon, si vous allez  à la bataille en ordre dispersée.
Cet appel au boycott est une arme politique pour obliger certains à réfléchir et à agir dans le sens de l'intérêt du pays. C'est donc le contraire d'une indifférence et d'une absence de participation.

Une telle position constituera pour les partis progressistes un sérieux avertissement car ils seront sûrs de perdre alors qu’ils pourraient trouver avec un peu de bon sens et d’amour pour leur pays un socle commun. Déjà beaucoup de tunisiens appellent à cette union nécessaire.
La création d’un mouvement parait aller dans ce sens : "Badera Watania" (Initiative nationale). Des intellectuels aussi ont lancé "L'appel de Paris" pour demander à Nida Tounes de favoriser l'union. Je ne peux que m'associer à cet appel.
En tous cas, j’appelle d’ores et déjà la société civile à réfléchir et à dire haut et fort sa volonté d’union des partis progressistes.

Rachid Barnat


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