mardi 4 août 2015

Le danger du halal

Les Frères musulmans islamisent en douce la société tunisienne ... et les tunisiens adoptent le wahhabisme par ignorance de leur malékisme. Exactement ce qu'ils font en Algérie, en Turquie ... gagne du terrain chaque jour. Est-ce le début de la fin de la Tunisie moderne ? Ou les tunisiens sauront-ils résister au wahhabisme rampant des "Frères" qu'en d'autres temps leurs ancêtre avaient rejeté ?
R.B
A l’actualité politique cette semaine, les réunions du bureau exécutif de Nidaa Tounes et du majlis choura d’Ennahdha, les deux premiers partis en Tunisie. Ceux qui s’attendaient à des annonces spectaculaires pour sauver le pays, en auront pour leurs frais. « La montagne a accouché d’une souris ». Mais Ennahdha, et encore moins Nidaa, ne peuvent être assimilés à des montagnes. On pourrait, en revanche, parler de souris et de rats.

La rumeur de la semaine est la nomination du député, dirigeant et chargé de communication d’Ennahdha, Oussama Sghaïer, à la tête du gouvernorat de Tozeur. L’information a été fuitée par le journal « Al Jarida » fondé par Noureddine Ben Ticha, dirigeant à Nidaa Tounes.
C’est ce même dirigeant d’Ennahdha qui, en février 2013, dénigrait le martyr Chokri Belaïd, juste après sa mort. « Il a dit des choses pire que ce que disait Hitler sur les juifs et le prophète sur les mécréants», témoigne le militant Taïeb Laâguili. Oussama Sghaïer est ce même dirigeant qui, en juillet 2013 au lendemain de l’assassinat du martyr Mohamed Brahmi, menaçait de porter plainte contre les députés qui boycottaient l’ANC, pour gaspillage de fonds publics. Ce même député serait donc nommé gouverneur ? Espérons que ce soit une intox, sinon ça va être compliqué pour les électeurs au vote utile.

On pourrait, éventuellement, accepter de faire un bout de chemin avec les nahdhaouis, au nom de l’intérêt national et de la réconciliation, mais il n’a jamais été question de nommer à la tête d’institutions républicaines, des personnes aigries ne respectant ni les vivants, ni les morts.

Depuis 2011, la bataille était contre ces gens aigris qui divisent les Tunisiens, en musulmans et mécréants, en révolutionnaires et azlem, en intègres et voleurs. Après les élections d’octobre et décembre 2014, on pensait que c’en était fini avec le discours de réconciliation des vainqueurs. Que nenni ! La stratégie de division se poursuit, elle a juste pris des proportions plus discrètes. Dans les milieux islamistes, on appelle ça « tactique ».
Il y a d’abord les islamistes masqués, comme les CPR et les Tayyar. Ceux là, ils continuent à mener le discours du « eux » et du « nous ». Ils n’ont retenu aucune leçon de la débâcle électorale et encore moins de leurs échecs quand ils étaient au pouvoir. Ils ne discutent jamais les idées, ils s’attaquent obligatoirement aux personnes.
Et il y a les islamistes, théoriquement apolitiques. Ceux là, on les trouve dans l’administration, la société civile, parmi les magistrats et dans différentes entreprises.
Ils vous rongent sans que vous vous n’aperceviez de rien. Au ramadan, ils ont fermé les restaurants et cafés, ouverts pour les non-jeûneurs et arrêté ceux qui ont osé transporter de l’alcool dans leur voiture.
Après le ramadan, la division prend d’autres allures, encore plus cyniques et plus silencieuses.

La dernière mode en Tunisie consiste en ces hôtels dits « halal ». Par hôtel « halal », on entend des unités touristiques qui ne servent pas d’alcool et autorisent leur clientèle à fréquenter la piscine, en étant vêtue de la tête aux pieds. L’opposé du « halal » est « haram », le licite contre l’illicite. Tout est dans le non-dit. La même stratégie a déjà été appliquée dans le système bancaire avec des crédits « halal » qui coûtent exactement la même chose, sinon plus cher, que les crédits « haram ». Idem pour les assurances.
Ce concept du « halal » a été créé sous d’autres cieux, dans des pays où la communauté musulmane est minoritaire et cherche des produits conformes à ses propres valeurs. Voir du « halal » dans un restaurant est un emblème marketing destiné à séduire une communauté bien déterminée.
Mais quid de ce concept dans un pays dont la majorité écrasante est composée de musulmans ? Quand bien même ces Tunisiens ne soient pas pratiquants, ils demeurent néanmoins musulmans, que ce soit par foi ou par culture.
Le propriétaire de l’un de ces hôtels dits « halal » a publié la semaine dernière un communiqué dans lequel il présente ses plates excuses. Ce n’est pas de sa faute, dit-il. Ce serait celle du tour opérateur turc. Les Turcs ? La Turquie ? C’est bien cette Turquie que dirige l’islamiste Erdogan, le grand ami d’Ennahdha ?
Faute de preuve tangible, le raccourci que je fais là apparaît comme tiré par les cheveux. Et pourtant ! Généralement, le cancer ronge le corps en silence et, souvent, on s’en aperçoit tardivement. A moins qu’il n’y ait un médecin trop suspicieux qui voit le mal partout et ne laisse rien au hasard.

Ce concept du « halal », aussi innocent en apparence, est très dangereux dans le fond. Contrairement aux sociétés européennes, il n’a pas lieu d’être en Tunisie, puisque notre société a toujours été homogène. Les divisions qu’on observe actuellement sont toutes récentes et relèvent, plutôt, de machinations édictées par des hommes politiques venus de l’étranger que d’un mal profond dans la société.
Des hôtels sans alcool, il y en a toujours eu et ce avant même la révolution, mais ils n’ont jamais usé de « halal » pour vendre leurs nuitées. Le plus luxueux d’entre eux s’appelle le Russelior, mais ceci ne rend pas son propriétaire plus pieux que les autres. Et encore moins plus honnête que les autres.
Nous avons même une compagnie aérienne qui ne sert pas d’alcool, Syphax Airlines, et le scandale financier qui s’apprête à éclater, les prochains jours, démontre clairement que le « halal » ne fait pas de vous une entreprise meilleure que les autres.
Entend-on par « halal » l’interdiction aux jeunes femmes de porter un maillot ou un bikini ? C’est interdit par la loi.
Entend-on par « halal » la possibilité pour les femmes de porter « une tenue islamique » pour se baigner ? La majorité des hôtels permet ce type de tenues, bien que les ministères du Tourisme et de la Santé doivent l’interdire catégoriquement pour des raisons d’hygiène.

Sans même que l’on s’en aperçoive, un nouveau vocable et un nouveau comportement sont en train de faire leur chemin dans le pays. On a commencé par accepter d’ériger des cités sans alcool (les Berges du Lac), puis on a interdit les restaurants et les bars dans les quartiers résidentiels, sans que personne ne réagisse par rapport à cette discrimination. Au supermarché, on vous regarde sévèrement quand vous attendez votre tour à la caisse avec une bouteille de bière ou de vin, on a interdit la vente d’alcool le vendredi, et, depuis quelques mois, on a prévu une file spéciale « alcool » dans certaines grandes surfaces.
Il n’y a pas très longtemps, ceux qui boivent et ceux qui ne boivent pas se fréquentaient le plus naturellement du monde et chacun respectait l’autre. Personne ne jugeait personne et chacun était libre de faire ce qu’il voulait.

Si on veut en finir avec ce modèle de citoyenneté et de fraternité entre les Tunisiens, il n’y a pas mieux que de leur ingérer des portions de concepts inconnus pour eux jusque là. 
La division est garantie et, c’est connu, on règne plus facilement quand on divise !

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