vendredi 31 mars 2017

WAHHABISME : CURIEUSE POSTURE DES HOMMES POLITIQUES FRANCAIS FACE A CETTE DOCTRINE !

Tous les responsables politiques de tous bords jurent vouloir éradiquer le terrorisme, mais rares sont ceux qui nomment la doctrine qui le fonde et osent pointer du doigt les pétromonarques qui la financent, la soutiennent et la diffusent dans le monde entier !

Alors que pour d'autres doctrines, leurs adeptes sont désignés par la doctrine qui les anime. Ainsi dit-on :
- communistes, pour communisme,
- fascistes, pour fascisme,
- nazis, pour nazisme ...

Il n'y a qu'avec le wahhabisme que ces hommes politiques recourent à un verbiage flou : 
- pratiquants d'un islam radical, 
- intégristes, 
- jihadistes, 
- salafistes, 
- extrémistes ... 
plutôt que désigner ses adeptes par :
- wahhabites ou 
- du nom de leurs partis politiques, comme celui des Frères musulmans les mieux implantés en France; protégés de l'émir du Qatar !

Même ceux qui l'ont fait une fois, n'ont plus osé le refaire, comme Fillon !!
Est-ce par ignorance, par manque de culture ou par peur de fâcher les pétromonarchies que fonde le wahhabisme ? De qui, de quoi ont-ils peur ?
Ont-ils été sermonnés par les pétromonarques, leurs "amis" et clients de la France pour ne plus nommer l'origine du mal ni d'accuser ouvertement les Ibn Saoud et l'émir du Qatar, premiers responsables de la diffusion du wahhabisme en Occident comme chez les "arabes" ?

Le pire, est que ces hommes politiques admettent d'associer les pétromonarques dans la lutte contre le terrorisme islamiste, devenu international ! Ils se moquent du monde, sans doute.

La realpolitik a des limites !


Rachid Barnat

mardi 28 mars 2017

Les athées sont plus intelligents que les croyants



L'athéisme, ou quand l'homme s'émancipe de dieu et cesse de croire à la Vérité Unique, ouvre l'esprit à d'autres vérités ! 
Le polythéisme des hommes n'a jamais engendré autant de guerres que le monothéisme qui a introduit la notion d'hérésie pour les justifier !
R.B

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Auteur de "Dieu et moi", l'historien, critique vis-à-vis des religions monothéistes, déplore que les non-croyants soient occultés par les médias. 

Vous avez expliqué que le monothéisme est plus violent que le polythéisme quand il s'allie avec le politique...
C'est la thèse que je soutiens dans La Violence monothéiste (2009). Pour bien faire comprendre qu'il existe une violence spécifique de la religion du dieu unique, j'ai fait dans ce livre une synthèse, sur une centaine de pages, de la pensée grecque que je connais bien pour avoir enseigné le grec au début de ma carrière. Du fait même de l'existence de plusieurs dieux, les dieux se neutralisent entre eux. Même Zeus, le roi des dieux, n'est pas tout-puissant, comme on le voit dans Homère. Il est contré par d'autres dieux, et il est obligé de transiger avec eux. Pour ce qui est des hommes, ils peuvent s'adresser à un dieu, et s'il n'est pas bien disposé, ils passent à un autre. Il y a donc la possibilité d'un jeu, qui fait qu'aucun dieu n'est en position de dire aux hommes : « Voici ce que tu dois faire. » À l'inverse, dans un monde où il n'y a qu'un dieu, celui-ci, qui est par définition l'auteur et le responsable de tout ce qui existe, ainsi que le garant de la vérité et du bien, peut édicter des impératifs absolus. Et à partir du moment où des hommes sont persuadés de détenir la vraie vérité, ils ont une tendance naturelle à vouloir l'imposer aux autres. 
Pour ces raisons structurelles, il y a ainsi dans le monothéisme une propension à la violence qui se manifeste quand les circonstances s'y prêtent. Cette violence s'exerce aussi entre les trois religions monothéistes. Au lieu de mettre en avant leurs points communs, à la manière de l'œcuménisme, elles sont en conflit depuis toujours. Si vous êtes persuadé en effet qu'il n'y a qu'un dieu, vous croyez également qu'il n'y a qu'une façon légitime de le vénérer. Les deux autres religions sont dans l'erreur. Et pour faire prévaloir le vrai culte du vrai dieu, il faut parfois recourir aux armes.

Les religions sont des productions humaines destinées à rendre le réel matériel plus agréable ou moins difficile à supporter  
À l'intérieur même des religions, les différentes interprétations peuvent créer des violences schismatiques, comme l'a démontré l'histoire : catholiques contre protestants, chiites contre sunnites ...
Oui, c'est une violence supplémentaire, qui oppose des variantes dans chacune des trois religions. Pour la même raison. Si vous pensez qu'il n'y a qu'une unique façon de vénérer le Dieu unique, les variantes concurrentes au sein de votre religion sont des hérésies qu'il faut combattre par tous les moyens. Cet état d'esprit est typique du monothéisme. 
Dans la Grèce ancienne, la notion d'hérésie n'existe pas.
Mais le monothéisme a aussi imprégné des leaders pacifiques comme Martin Luther King ou le mouvement de résistance de la Rose blanche contre les nazis ...
L'athée que je suis ne rejette pas les religions comme quelque chose qui serait fondamentalement mauvais. Je constate qu'il y a des religions dans tous les peuples dont nous avons connaissance. Ce seul fait prouve que les religions sont sinon nécessaires du moins utiles aux êtres humains, qui élaborent à ce sujet des constructions mentales collectives. Ces constructions sont fictives, mais elles ont un impact sur les sociétés, en bien comme en mal. J'écrivais dans la première phrase de mon premier livre : « Les dieux sont des personnages historiques, Dieu y compris. » Ils apparaissent à un moment donné dans un coin du globe, ils vivent aussi longtemps qu'il y a des hommes qui sont persuadés de leur existence et ils finissent par mourir. 
Les dieux sont imaginaires sans doute, mais l'imaginaire est une composante du réel. Les religions, comme les mythes ou les contes, sont des productions humaines destinées à rendre le réel matériel plus agréable ou moins difficile à supporter. C'est ainsi que les religions peuvent être bénéfiques. Heureusement ! Je ne condamne que celles qui nous ordonnent de tuer pour l'amour de Dieu.
Dans cette autobiographie, vous dévoilez aussi vos drames intimes avec notamment votre femme Maria qui a perdu la mémoire à la suite d'un AVC. Face à la maladie, face à la mort qui approche, avez-vous eu des moments de doute ?
J'ai eu un ou deux moments de doute très brefs dans ces épreuves-là. Je me suis dit : « Si j'avais gardé la foi de mon enfance, elle m'aurait aidé. » Mais ce sentiment était fugitif, parce qu'à partir du moment où on a franchi un certain cap dans le chemin de l'incroyance, on ne peut pas revenir en arrière. Ce n'est pas moi qui demanderai sur mon lit de mort qu'on m'apporte l'extrême-onction. Autrement dit, j'attends la mort sereinement. Les épreuves sont difficiles à supporter, mais je les supporte sans la moindre nostalgie pour une religion qui serait consolatrice.

Il faudrait donc qu’au nom même de la laïcité, on octroie un espace public dans les médias aux athées pour qu’ils puissent s’y s’exprimer.
Les religions aujourd'hui occupent une place importante dans les médias, et certains intellectuels évoquent un « retour du religieux ». Est-ce que vous trouvez que les athées ne sont pas assez présents dans les médias ?
Vous avez tout à fait raison de souligner ça. Ce qui me frappe, c'est qu'on ne parle que des religions et des conflits qu'elles provoquent, mais on ne parle pas de la partie du peuple qui n'a aucune religion. Les athées véritables sont peu nombreux. En France, nous sommes peut-être 10 %, et c'est un pays en pointe en la matière. Il n'en reste pas moins qu'il faudrait dans les médias donner une place équitable aux athées à côté des religieux. Par exemple, le dimanche matin, je regarde par curiosité sur France 2 les émissions consacrées au christianisme, au judaïsme ou à l'islam. Je trouverais normal qu'il y ait aussi une émission pour les athées. Dans l'esprit même de la laïcité, n'importe qui peut croire en n'importe quoi. Mais n'importe qui peut aussi ne pas croire et critiquer toutes les religions. Il faudrait donc qu'au nom même de la laïcité, on octroie un espace public dans les médias aux athées pour qu'ils puissent s'y s'exprimer. Et ils auraient des choses à dire pour analyser en particulier les violences qui sont commises au nom du Dieu unique !
Que les deux finalistes de la primaire à droite, François Fillon et Alain Juppé, se soient réclamés du pape François, ça vous choque ?
J'ai trouvé ça absurde. On voit que, dans leur esprit, la France reste un pays chrétien, et ils se basent là-dessus pour séduire des électeurs. L'identité de la France serait principalement religieuse et chrétienne. Et les tenants des autres religions n'auraient pas le droit de rivaliser avec la religion chrétienne, car ce serait contraire à l'identité française. La religion joue en effet un rôle important dans l'identité des peuples. Mais il n'empêche qu'aujourd'hui, dans un pays comme la France qui a conçu la notion de laïcité, on ne peut pas définir un pays en fonction d'une religion, même si elle est majoritaire. Le propre de la France, ce qui fait la force de sa culture et de sa philosophie, c'est d'avoir empêché, avec Voltaire et la Révolution, qu'une religion domine notre pays.
Les musulmans ont une pratique religieuse plus soutenue que le reste de la population française, notamment chez les jeunes. Et selon l'Institut Montaigne, 29 % des musulmans estiment même que la loi islamique est plus importante que la loi de la République. Cela vous inquiète-t-il ?
Je trouve inadmissible que des musulmans vivant en France mettent la loi islamique au-dessus des lois de la République. Aucun gouvernement ne doit le tolérer. Si ces croyants veulent être logiques avec eux-mêmes, ils doivent quitter la France et aller vivre dans un pays musulman.
« Aucun dieu n'a vécu plus de quelques millénaires », écrivez-vous. Les monothéistes vont-ils donc disparaître ?
Après une conférence que j'ai faite dans une université parisienne, deux Chinoises se sont levées et m'ont dit : « Monsieur, nous ne comprenons pas ce que c'est le monothéisme. » Je leur ai dit qu'elles avaient raison. L'idée qu'il n'y a qu'un dieu est une anomalie récente dans l'histoire des religions. Elle a 2 400 ans à peine et elle est circonscrite à une partie seulement de l'humanité. La question « Dieu existe-t-il ? », avec une réponse attendue par « oui » ou par « non », peut nous sembler évidente, mais elle ne dit rien à des Chinois ou à des hindous et elle n'aurait rien dit à des Grecs de l'Antiquité. Je suis convaincu que cette religion finira par disparaître, comme ont disparu la religion des Égyptiens qui a duré plus de trois millénaires ou celles des Grecs et des Romains.
 Il faudrait créer des couvents pour athées 
Les athées vont-ils, selon vous, devenir majoritaires dans le monde ? Ou d'autres spiritualités se développeront-elles, car l'homme a toujours besoin de croire en quelque chose ?
Ça m'attriste, mais je pense que les athées resteront longtemps minoritaires. Les religions sont si importantes pour la plupart des individus, comme pour les sociétés humaines, que les religions qui vont disparaître feront place à d'autres religions, avant qu'on n'arrive un jour peut-être à un monde majoritairement athée. Mais en attendant, nous pouvons faire avancer la réflexion sur la nature et les visées des religions, si bien que le religieux devrait être peu à peu marginalisé. Il y a une lutte engagée depuis des siècles et des siècles entre la clairvoyance et la crédulité. La clairvoyance, de mon point de vue, c'est la conviction qu'il n'y a pas de dieu. La crédulité, c'est le besoin de croire à tout prix, envers et contre tout, parce qu'on y trouve des avantages, qu'il existe un monde surnaturel où un dieu qui sait tout se préoccupe de nous.
D'un strict point de vue marketing, l'athéisme peut-il, sur le marché des convictions, concurrencer des religions qui offrent une consolation pour la mort et des cérémonials spectaculaires ?
C'est vrai qu'il manque aux athées des rituels pour la naissance, le mariage et la mort. Les rituels sont très importants, ils sont présents dans toutes les sociétés. C'est une lacune dans l'athéisme. Je dis dans mon dernier livre qu'il faudrait créer des couvents pour athées. Avant de quitter Israël, j'ai passé quinze jours merveilleux à l'École biblique de Jérusalem chez les dominicains. Je me sentais très bien chez eux, à la seule réserve que je ne croyais pas en Dieu.
Pour vous, le meilleur antidote contre les religions serait de faire une « cure d'Homère ». Pourquoi ?
Lorsque j'ai lu entièrement Homère du premier vers de l'Iliade au dernier vers de l'Odyssée, comme je l'avais fait pour la Bible, j'ai découvert des aspects qui m'avaient échappé. J'avais traduit Homère devant des élèves, mais je n'avais pas été véritablement sensible à la façon désinvolte, ironique, irrévérencieuse avec laquelle il traite les dieux. Il se moque d'eux. Il y a là un jeu, un esprit d'indépendance, qu'on ne trouve pas dans les religions monothéistes où le sérieux plombe tout. Les illuminés qui tuent pour l'amour de Dieu feraient bien de se plonger dans le monde de la Grèce ancienne, où ce genre de fanatisme n'existe pas. La multiplicité des dieux et la liberté des hommes à leur égard inclinent à la tolérance. Si tout est relatif, il ne peut pas y avoir d'absolu. Alors que les fidèles des religions monothéistes affirment que l'homme doit servir Dieu, les Grecs se servaient des dieux, avec un mélange de pragmatisme et d'humour. D'où le titre de mon livre : Le sourire d'Homère (2014).
 Quand on est passé de la croyance à l’incroyance, on a fait un pas en direction de l’intelligence 
Pour critiquer vos thèses, Claude Lanzmann a rappelé que chez les polythéistes grecs, les massacres, viols et esclaves ne manquaient pourtant pas...
Bien sûr qu'il y a eu des violences en Grèce. Le polythéisme n'est pas forcément facteur de douceur de vivre. Mais si on regarde de près la civilisation grecque sur un millénaire, de Homère à Plutarque, on constate qu'il n'y a jamais eu de guerres de religion. Le plus grand conflit, celui qui a opposé Athènes et Sparte, la guerre du Péloponnèse, n'avait pas de fondements religieux. Si les conflits provoqués par les monothéistes sont les plus sanglants de tous, c'est parce que ces croyants transfèrent dans la politique l'Absolu qui caractérise leur religion, celle de l'Unique.
Pensez-vous que les athées soient des personnes plus intelligentes que les croyants ?
De mon point de vue, oui. Les athées ont une plus grande ouverture d'esprit et plus de lucidité que les croyants. C'est ma conviction. Évidemment, vous allez me dire que je prêche pour ma chapelle, si on peut parler de chapelle à propos d'athéisme (rires). Mais je m'inscris dans la lignée des Grecs, qui avaient décidé d'être intelligents. Comprendre, ce n'est pas une question de gènes, mais de volonté. Le désir de comprendre est fondamental chez les athées. Quand on est passé de la croyance à l'incroyance, de mon point de vue, oui, on a fait un pas en direction de l'intelligence.
Si vous n'aviez droit qu'à un seul argument pour « convertir » un croyant à l'athéisme, que lui diriez-vous ?
Regarde autour de toi ! Au lieu de rester prisonnier de ce qu'on t'a dit quand tu étais enfant, de ce qu'on t'a présenté comme la vérité incontestable dans ta famille, ton milieu social ou ton pays, ouvre les yeux sur l'extérieur. Regarde tout ce que les hommes ont pensé de différent, dans d'autres régions du monde et dans des passés lointains. Tu en viendras naturellement à considérer que ce qui te paraissait évident est relatif. Et tu auras l'impression d'acquérir une meilleure compréhension de l'aventure humaine.
Propos receuillis par Thomas Mahler

jeudi 23 mars 2017

LONDRES & L'ISLAMISME : LA BOUCLE EST BOUCLEE !

Article paru dans Agoravox

22.03.2017 - Londres : Encore un attentat !
Londres capitale de l'islamisme, est devenue sa cible.


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Rappel :

La doctrine qui fonde tous les mouvements islamistes, dits aussi "salafistes", dits aussi "intégristes"; est le wahhabisme, dit aussi "islam radical" !
Le nom des mouvements change mais la doctrine reste la même : Les Frères musulmans (FIS en Algérie, Ennahdha en Tunisie, AKP en Turquie ...), Al Qaida, Al Nosra, Bokoharam, Daech ...

Or les anglais furent les premiers à avoir instrumentalisé le wahhabisme pour mettre fin à l'empire Ottoman !

Depuis la chute du mur de Berlin, les anglais ont fait de Londres la capitale des islamistes, accordant le droit d'asile "politique" aux opposants des régimes "arabes" : d'Algérie, d'Egypte, de Tunisie, de Libye, de Syrie ...
Les anglais pensaient ainsi se prémunir contre le terrorisme inhérent au wahhabisme !

Mais voilà, depuis que les américains et leurs coalisés, dont les anglais, ont instrumentalisé le wahhabisme pour déstabiliser cette fois-ci le monde "arabe"; les islamistes ont décidé de porter leurs coups en Occident, après avoir semé le chaos dans les républiques "arabes" : Afghanistan, Pakistan, Iraq, Algérie, Tunisie, Egypte, Libye, Syrie, Yémen, Somalie, Soudan, Niger, Mali ....

Et voilà comment l'arroseur est arrosé à son tour; puisque le wahhabisme et ses horreurs, reviennent comme un boumerang à la face de ceux qui les instrumentalisent !

Et ce n'est que le début : Les américains aveuglés par leur phobie du péril rouge (le communisme), ont soutenu leurs alliés pétromonarques dans la diffusion du wahhabisme ; persuadés que ce péril vert ne touchera que les pays "arabes" ! Inconcience ou cynisme de la part des dirigeants occidentaux ?

Grave erreur : car si les "arabes" ont été les premières victimes de cette stratégie machiavélique par le chaos généralisé et par le nombre de morts; désormais ce sera le tour des apprentis sorciers, puisque les occidentaux paient dans leur chair les erreurs stratégiques de leurs gouvernants : EU, Canada, Australie, France, Angleterre, Belgique, Allemagne, Italie, Espagne .... aucun pays ne sera épargné par le wahhabisme et son nihilisme.

Le pire, c'est que l'athéisme du communisme laisse place à une doctrine obscurantiste très prosélyte, qui joue du sacré; puisques les nouveaux convertis au wahhabisme se recrutent aussi bien chez les enfants des immigrés de culture "musulmane" que chez des autochtones de culture « chrétienne » !

Grace à leurs pétrodollars, les pétromonarques prennent leur revanche sur l'Occident qui les méprise ; puisqu'à l'impérialisme américain, ils répondent par l'impérialisme "religieux" ... dont ils se disputent pour le moment le leadership : Ibn Saoud ou son frère ennemi l'émir du Qatar ? A moins que ce soit l'Iran dont la "révolution islamiste" s'est beaucoup inspirée de la doctrine des Frères musulmans, c'est à dire du wahhabisme !

Moralité : à jouer avec le feu, on finit par se brûler les doigts. 

Rachid Barnat





dimanche 12 mars 2017

Il faut réaffirmer la laicité face à l'islamisme

Mais encore faut-il nommer la doctrine qui le fonde !
Dommage que le philosophe Marcel Gauchet ne fasse pas la distinction entre islam et islamisme et ne dénonce pas la doctrine qui fonde ce dernier, qu’est le wahhabisme.

R.B

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Marcel Gauchet


« Nous allons devoir revenir à une laïcité de combat »

La vague terroriste qui a submergé la France a remis au centre du débat la place de l'Islam et des musulmans dans notre pays. Le philosophe Marcel Gauchet analyse ce phénomène complexe d'affirmation religieuse dans un pays où le principe de laïcité était présumé avoir réglé une fois pour toute le sujet.
Le terrorisme islamiste s'installe dans la durée en France. Cela va-t-il modifier le rapport des Français à la religion ?
La France est prise à contre-pied par un phénomène qui n'entre pas dans son système de références spontané, lequel est le produit d'une évolution longue. Nous sommes passés d'une situation d'affrontement entre la République et l'Eglise catholique, qui a été un des antagonismes structurants de la société depuis la Révolution, à une situation d'apaisement. L'influence de l'Eglise catholique a reculé et la laïcité a évolué vers un pluralisme démocratique où les chrétiens ont toute leur place. Cette pacification de la question religieuse est prise à revers par l'importation d'une religion qui ne cadre pas avec ce mouvement.
La question de l'islam n'est pas nouvelle...
Elle a maintenant un quart de siècle, mais elle s'est aggravée. Au moment où les affaires de voile commencent à faire du bruit, au début des années 1990, on pouvait penser que ce n'était pas dramatique et que l'islam trouverait sa place dans ce paysage pacifié. Vingt-cinq ans sont passés et il n'en est rien. On a assisté au contraire à un mouvement d'affirmation très complexe de l'islam hors de nos frontières, et à l'intérieur de celles-ci au sein de la population immigrée de confession musulmane. A la différence de l'Eglise catholique d'autrefois, l'islam ne revendique pas une position d'autorité par rapport au pouvoir politique. 
Il y a en revanche un islam civilisationnel, extraordinairement enraciné chez ses croyants qui veulent voir persister des mœurs liées à une loi religieuse supérieure. Nous sommes désarmés devant ce nouveau visage du problème de la laïcité et nous ne savons pas y répondre. Le lien avec le prosélytisme terroriste de L'Etat islamique achève de dramatiser les choses. Car autant il n'est pas douteux que les musulmans dans leur masse ne sont pas des terroristes en puissance, autant le problème que pose la coexistence de l'islam avec les sociétés modernes est bien réel. D'où l'anxiété majeure qui en résulte dans la vie collective. D'où le réflexe de rejet et l'exploitation politique qui est faite de la question, laquelle empêche d'élaborer une réponse consensuelle.

Comment en sortir ?
Passé ce moment de stupeur anxieux, la société française va tôt ou tard profondément bouger. En attendant, j'observe que la tentation du rejet reste contenue par un refus très impressionnant de monter aux extrêmes. La société française est globalement très raisonnable. Il n'y a pas eu de dérapage malgré la sidération et le sentiment d'impuissance.
Le débat sur la sécurité d'un côté et le respect des libertés de l'autre n'en reste pas moins ouvert...
Ce débat est une manière d'euphémiser la question qui est de savoir si l'Etat de droit peut permettre d'agir efficacement sans dépasser les bornes qui sont actuellement les siennes, ou s'il faut remettre en question ce que nous pensions être la manière normale de fonctionner de nos sociétés.
Les Français ne donnent pas le sentiment d'en avoir envie, mais plutôt d'attendre des réponses policières classiques...
C'est vrai, mais ces réponses policières classiques deviennent absurdes. En quoi le fait d'interner toutes les personnes fichées empêchera-t-il celles qui ne le sont pas de passer à l'acte ? Et combien de temps les enferme-t-on ? Où ? Comment ? Cela n'a pas de sens. Il n'y a pas de réponse qui puisse être rapide et efficace à la fois. En fait, nous sommes confrontés à un dilemme. C'est une situation qui peut durer. Mais elle débouchera inéluctablement sur une mise en mouvement.
Réfutez-vous toujours l'idée d'un choc inéluctable des civilisations ?
Oui, car ce choc supposerait qu'il y ait une compacité du monde musulman qu'il n'a pas. Il y a des musulmans démocrates, on le sait, dont le désespoir est de ne pas réussir à faire prévaloir leurs principes dans leur société. L'islam est divisé entre attraction et répulsion à l'égard du monde occidental. Une grande partie des musulmans est de notre côté. C'est cette division que nous devons exploiter. Mais cela nous oblige à repenser politiquement ce que nous avons l'habitude de ne traiter qu'au niveau de la conscience individuelle. Pour nous, la religion est une affaire personnelle. L'islam nous confronte à autre chose.
La réponse pourrait-elle être une refonte de la laïcité ?
Nous n'y couperons pas. Nous allons revenir à une laïcité de combat. Entendons-nous bien : il ne s'agit pas d'un combat antireligieux. La République n'a pas fermé les églises hier ; elle ne va pas fermer les mosquées aujourd'hui. Nous allons plutôt nous trouver à devoir faire pression sur l'islam pour l'obliger à se déterminer par rapport aux principes fondamentaux de l'existence démocratique, pour autant qu'il est aujourd'hui une composante de notre société. Comme la République l'a fait, d'une certaine façon, à l'égard de l'Eglise catholique. La difficulté est que la religion musulmane n'est pas organisée comme elle. Tous les ministres de l'Intérieur rêvent d'une « église musulmane » avec un interlocuteur unique, mais on ne l'a pas. Donc, il faut envisager les choses autrement.
Le terrorisme va-t-il accroître ou au contraire freiner le mouvement d'individualisation de nos sociétés ?
Les attentats ont déclenché un élan patriotique que l'on ne soupçonnait pas. Le mouvement d'individualisation n'est donc nullement incompatible avec un fort sentiment d'appartenance patriotique. C'est saisissant. En fait, cet individualisme n'est pas synonyme de repli. Je suis frappé, par exemple, par l'intensité de l'effort de connaissance de l'islam qui est à l'œuvre dans la société française. Des gens parfois très simples, qui au départ ignoraient tout de cette religion, ont fait l'effort de s'instruire et ont acquis un bon niveau de connaissance. Je suis aussi frappé par le refus de défendre des solutions de facilité. Tout le contraire des politiques qui se coupent de la société par des propositions démagogiques qui ne trompent personne.
Le vainqueur de 2017 sera très probablement issu des partis de gouvernement, mais il ne disposera que d'une faible légitimité. Au lendemain de son élection, le nouveau président sera déjà minoritaire dans l'opinion
Il y a un paradoxe : une exigence de mesures sécuritaires immédiates, mais un grand scepticisme sur leur efficacité ou leur faisabilité...
Le premier réflexe après un attentat est d'interpeller les gouvernants : que faites-vous pour nous protéger ? Dans un deuxième temps, on s'interroge sur la pertinence des réponses. Voyez l'épisode de la déchéance de nationalité : François Hollande a d'abord été unanimement applaudi, puis avec le recul les gens ont commencé à se rendre compte que cela posait de sacrés problèmes.
Est-on à l'abri d'une victoire de Marine Le Pen ?
En l'état actuel des choses, je le crois. Dans six mois ou dans un an, je ne sais pas. Ses solutions ne convainquent pas, mais l'impuissance avérée des politiques conventionnelles devant la menace terroriste peut changer la donne. Dans tous les cas, le FN fera sans doute un score très élevé. Marine Le Pen est celle qui a le mieux compris les frustrations des Français. Elle a incontestablement un sens politique aigu.
C'est-à-dire ?
Elle est capable de dire aux électeurs des deux bords ce que leurs partis d'origine ne prennent pas ou ne prennent plus en charge. Evidemment, il n'y a aucune cohérence dans le programme du FN mais ses militants s'en fichent et ses électeurs aussi. Cela ne suffit pas à en faire une force de gouvernement mais cela en fait une force de contestation redoutable. Le vainqueur de 2017 sera très probablement issu des partis de gouvernement, mais il ne disposera que d'une faible légitimité. Au lendemain de son élection, le nouveau président sera déjà minoritaire dans l'opinion. La légitimité populaire risque d'être du côté d'une force politique, le Front national, incapable de gouverner.
Croyez-vous que la droite soit vraiment prête à mener des réformes économiques et sociales radicales ? Les candidats à la primaire affichent des programmes ambitieux...
C'est beaucoup de bruit pour rien. J'ai les plus grands doutes sur les propos virils qui n'engagent que ceux qui les écoutent. Ce scepticisme est d'ailleurs largement partagé par l'opinion, hors du noyau dur des militants.
La France aurait-elle besoin d'un épisode thatchérien pour se moderniser ?
Margaret Thatcher est un pur produit de l'histoire anglaise. Elle est arrivée dans un contexte où les syndicats avaient mis le pays à terre, où le FMI était à Londres, et elle a dit aux Anglais que pour retrouver sa grandeur, le pays devait renouer avec son histoire libérale. La recette ne peut pas fonctionner en France. Pour imposer des réformes, les libéraux, dans notre pays, disent aux Français qu'ils doivent cesser d'être ce qu'ils sont. Etonnez-vous de leur peu d'enthousiasme ! Il faut les convaincre que les réformes sont indispensables à la poursuite de leur histoire. Autrement dit, il faut leur tenir un langage patriotique et politique au lieu de se contenter du langage technique de l'économie. Encore faut-il au moins un discours. C'est ce qui a manqué à François Hollande. En bon héritier de Mitterrand, il a évité de dire franchement ce qu'il voulait faire : s'en remettre à l'efficacité libérale pour dégager les moyens de la redistribution.
Quel est son bilan ?
Il a d'abord évité au pays l'épuisement psychologique qui aurait résulté de cinq ans de plus de sarkozysme, avec des débats hystérisés et sans colonne vertébrale du matin au soir ! Le progrès, ici, c'est qu'on peut détester Hollande calmement. Pour le reste, il a fait le minimum syndical sur le plan économique et budgétaire pour maintenir le pays à flot. Paradoxalement, je pense qu'il aura surtout fait avancer le débat en étalant ses propres limites. La gauche a désormais compris, dans sa grande majorité, qu'il fallait cesser de rêver à une alternance radicale. Il aura fallu trente-quatre ans, depuis le tournant de 1983, pour qu'elle parvienne à mettre ses paroles en accord avec ses actes. Elle le devra à Hollande.

La gauche du PS est néanmoins très remontée...
Les contestataires tiennent médiatiquement le haut du pavé, mais qui est en tête dans les sondages chez les sympathisants du PS ? Manuel Valls et Emmanuel Macron.
Emmanuel Macron peut-il incarner l'avenir de la gauche ?
Il le pourrait à terme, avec un peu plus de maturité. Je trouve idiot le procès en droitisation qui lui est fait. Mais son discours reste trop axé sur la performance économique, il lui manque le versant « patriotique », ce point mystérieux autour du bien collectif où droite et gauche se rencontrent. Il peut grandir. Les ennuis, pour lui, ne font que commencer, ça va l'amener à réfléchir.
Deux mois après le vote sur le Brexit, il n'y a pas eu de cataclysme et les négociations risquent de durer. Est-ce finalement un non-événement ?
Cela reste un événement symbolique majeur : le Brexit fait tomber le dogme de l'irréversibilité de la construction européenne, qui plus est sur une base démocratique. Le sentiment est par ailleurs largement partagé sur le fait que l'Europe doit se réformer. Mais on ne sait pas comment faire. Le premier obstacle est que l'Allemagne, en position hégémonique, n'est pas prête à bouger.
Elle est pourtant prête à plus d'intégration politique, à des transferts de souveraineté...
Quand on est le souverain de fait, les abandons de souveraineté ne coûtent pas cher ! L'Allemagne a imposé son modèle à la zone euro, elle peut se permettre de le « dégermaniser ", ce qui voudrait dire l'imposer un peu plus aux autres ! Ce n'est pas de la même chose en pire dont l'Allemagne a besoin, mais d'un changement radical d'orientation pour relever le défi stratégique qui s'impose à elle. Le monde brûle à ses portes, et tout ce qu'elle sait faire, c'est se regarder le nombril.
Etes-vous tenté par un « frexit " ?
Non. Avant d'en arriver là, la France peut utiliser bien d'autres cartes, jusque et y compris le chantage au départ. Sans la France, il n'y a plus d'Union européenne. Cela nous donne de quoi nous faire entendre. La politique de la chaise vide de De Gaulle avait plutôt bien réussi. Mais il y faudrait des personnalités politiques d'une trempe dont nous ne disposons pas pour le moment..
Que changerait une victoire de Donald Trump ?
Le fait qu'il soit le candidat républicain est déjà un tournant. On ne voyait pas les Etats-Unis comme cela, on avait tort. Il est hélas clair qu'ils sont devenus la « puissance irresponsable ", au lieu de la « puissance indispensable " que revendiquait Madeleine Albright. Ils nous ont mis dans le pétrin au Moyen Orient, et avec Donald Trump ce serait avec la planète entière. Avec Mme Clinton, ce serait juste l'aveuglement et le désordre ordinaire. Il est grand temps que l'Europe révise ses batteries à l'égard des Etats-Unis.

Propos receuillis par Joel Cossardeaux - Etienne Lefebvre

Pourquoi réformer l’islam est faisable


Depuis que les Frères musulmans et les pétromonarques ont pris en otage l'islam et réussi à imposer leur idéologie wahhabite dans le monde sunnite, à coup de pétroldollars, l'islam n'est que politique.
Pour re-spiritualiser l'islam, il faut le dé-wahhabiser !
R.B

Mohamed Haddad

L'islam n'est pas synonyme d'inertie et l’étude du mouvement réformiste du XIXe siècle est utile pour appréhender les débats qui animent le monde musulman, affirme Mohamed Haddad, professeur d'islamologie et de religions comparées à l'université de Carthage (Tunisie) dans Le Réformisme musulman, une histoire critique*.
Alice Papin : En 1995, sous la direction de l’islamologue Mohammed Arkoun, vous avez soutenu une thèse sur Mohammed Abduh, l’une des figures de proue du réformisme musulman dont vous retracez le parcours dans cet ouvrage. Quelles étaient les idées de cet homme qui fut grand mufti d’Égypte de 1889 jusqu'à sa mort en 1905 ?
Mohamed Haddad : En s'inscrivant dans un courant réformiste qui avait commencé avant lui, Mohammed Abduh a voulu sincèrement trouver des positions médianes entre la modernité et l'islam. À plusieurs reprises, il a affirmé que l'islam avait besoin d'un Martin Luther. 
Au XIXe siècle, Jamal al-Din al-Afghani, autre maître à penser influent d'origine perse, a tenu des propos aussi forts, aussi novateurs. À cette époque, était tout à fait acceptable l’idée qu'il fallait réformer la pensée musulmane en élaborant notamment des concepts modernes, comme le caractère civil de l’État.
Cette alternative entre la mise en place d'une laïcité stricte et une institution théocratique, proposée par Mohammed Abduh il y a plus d'un siècle, semble d'ailleurs toujours d'actualité. Cette question a ressurgi en Tunisie à partir de 2011. Lors de l'élaboration de la nouvelle Constitution, s'affrontaient les partisans de la charia et les laïcistes. En guise de compromis, le deuxième article de la Constitution reconnaît le caractère civil de l’État.
Loin de se cantonner au domaine politique, Mohammed Abduh a également réinterprété des versets coraniques à la lumière de la théorie de l'évolution de Darwin et a promulgué, en sa qualité de mufti d’Égypte, la célèbre fatwa dite « du Transvaal ». Ce texte permet aux musulmans de consommer la viande abattue par des gens du Livre (juifs et chrétiens) et même de porter des habits occidentaux. Or, cette volonté d'ouverture, bien que tâtonnante, a disparu à partir des années 1930.
Alice Papin : Qu'est-il alors advenu de cette position médiane ?
Mohamed Haddad : Plusieurs années après la mort du mufti d’Égypte, l'un de ses disciples, Mohammed Rachid Rida (1865-1935), réussit l'entreprise la plus pernicieuse de l'islam moderne. Sympathisant du wahhabisme, il s'impose comme légataire du courant réformiste et réécrit l'histoire de Mohammed Abduh sous l'influence de ce mouvement fondamentaliste. 
En 1930, Mohammed Rachid Rida publie une imposante biographie de Mohammed Abduh, en trois tomes, de plus de 2000 pages, dans laquelle il se flatte dès l'introduction d'avoir été chargé par l'ancien mufti d’Égypte de diffuser sa pensée et sa sagesse. 
Depuis, ceux qui étudient l'histoire du mouvement réformiste s'appuient sur cet ouvrage et le citent comme une source scientifique. 

Cette réécriture coïncide avec l'émergence, dans les années 1930, de deux courants fondamentalistes, les Frères musulmans et le wahhabisme, qui cherchent à s'inscrire dans une filiation historique ancienne. 
Pour légitimer leur existence et leurs actions, ils se déclarent autant les descendants du prophète Mohamed que des réformateurs du XIX e. Cette vision jouit d'une littérature abondante et je l'ai déconstruite parce que, scientifiquement parlant, elle n'a rien d'authentique. 
Alice Papin : La réforme qu'avaient initiée Mohammed Abduh et ses contemporains a-t-elle connu une suite ?
Mohamed Haddad : Non. Il s'agit d'une réforme avortée. Elle est restée dans un état embryonnaire, celui de tentative individuelle. Cet élan s'est ralenti au début du XXe siècle et n'a été poursuivi que par de rares écrivains et universitaires. Les raisons de cet échec sont multiples, complexes. Ce mouvement avait commencé au XIXe, avant la colonisation. Une fois que les États du Proche et du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord sont passés sous contrôle de l'Angleterre, de la France ou encore de l’Italie, les idées de la réforme ont perdu une partie de leur crédibilité. L'Occident, que l'on prenait comme référence, est devenu l’ennemi. 

Après les vagues de décolonisation, la période n'était pas plus propice. Dans les années 1960 se répand une idéologie qui considère que le progrès est avant tout technique. Ainsi, la question religieuse passe au second plan. Une mise à l'écart qui facilitera, par la suite, l'émergence de l'islam politique. Cette période est, de plus, marquée par la montée en puissance des États arabes du Golfe grâce à l'économie pétrolière. Face à l'Arabie saoudite ou le Qatar, des institutions aussi prestigieuses que l'université al-Azhar (Le Caire, Égypte) perdront de leur aura, faute de moyens.
Alice Papin : En quoi une histoire critique du réformisme musulman est-elle nécessaire pour comprendre les débats qui animent le monde musulman ?
Mohamed Haddad : Les tentatives du XIXe siècle démontrent que l’on se trompe lorsqu'on déclare que l'islam n'est pas réformable. Une alternative est crédible, faisable, puisque Mohammed Abduh a posé des jalons dans ce sens. En théorie, toutes les religions peuvent être réformées si l'on définit ce mouvement comme une tentative de réadaptation valorisante de la représentation du sacré aux exigences de situations nouvelles. Avoir conscience de cette possibilité permet d'affirmer que des changements sont possibles dans le monde musulman dominé aujourd'hui par l'islam politique et le wahhabisme.
Il est urgent d'amorcer un vaste chantier pour sortir de cette situation. De réinterpréter cette tradition religieuse pour qu'elle soit plus en adéquation avec les normes modernes de la société : l'économie de marché, les sciences humaines, les libertés individuelles, l'égalité hommes-femmes. 
Devront participer à cette entreprise des musulmans, mais aussi des non-musulmans. Le dialogue entre les religions sera nécessaire pour enrichir chacun et moderniser l'islam qui demeure, sous certains aspects, une spiritualité médiévale.
Alice Papin : De nos jours, des musulmans cherchent-ils, comme Mohammed Abduh, à trouver des positions médianes entre la modernité et l'islam ?
Mohamed Haddad : Des écrivains et des universitaires tentent de faire bouger les lignes, comme Mahmoud Mohamed Taha, un Soudanais exécuté en 1985 par un dictateur converti à l’islamisme et proche des Frères musulmans. Homme politique, mais aussi théologien musulman libéral, il a élaboré une pensée religieuse qui mérite notre attention : en règle générale, les musulmans s'accordent pour déclarer que le Coran se divise en deux périodes, celle de La Mecque et de Médine. 
En se plongeant dans le texte, on remarque que le Coran de La Mecque énonce des principes généraux, au contraire de celui de Médine qui établit des législations détaillées. 

De par cette différence, pour Mahmoud Mohammed Taha, l'essence de l'islam repose sur le Coran de La Mecque et non de Médine, puisque la société a changé et que ces législations constituent des réponses à des situations historiques spécifiques. 
Or, en majorité, les musulmans considèrent que les versets de Médine priment sur ceux de La Mecque. 
De nos jours, peut-être faudrait-il inverser cette primauté ?
Alice Papin : À la fin de votre ouvrage, vous proposez de « re-spiritualiser l'islam pour le dé-wahhabiser » afin que cette religion ne se transforme pas en une idéologie de type politique. Qu'est-ce que cela signifie ?
Mohamed Haddad : Une religion a toujours deux fonctions, une identitaire et une autre spirituelle. Or, de nos jours, l'islam fonctionne uniquement sur son versant identitaire. La spiritualité a disparu. Lorsque aujourd'hui, on cherche à citer un maître spirituel, on évoque le nom de personnalités musulmanes mortes depuis des siècles comme le mystique soufi Al-Ghazali ( 1058-1111) ou le grand penseur Ibn Arabi (1165-1240).
Depuis que les Frères musulmans et les wahhabites ont réussi à imposer leur idéologie dans le monde sunnite, l'islam n'est que politique. Pourtant, des solutions concrètes existent pour «re-spiritualiser l'islam» et ainsi le «dé-wahhabiser». À cette fin, l'Occident et notamment l'Europe ont un rôle à jouer, puisque cet espace accueille plusieurs millions de musulmans en son sein. À la fin des années 1980, Mohammed Arkoun avait proposé de fonder une faculté de théologie musulmane à Strasbourg où se trouvent déjà des établissements de théologie catholique et protestante. J'avais travaillé avec lui sur cette proposition, mais nous n'avons jamais réussi à convaincre les décideurs de l'intérêt du projet. Quelle déception aujourd'hui ! Si cette faculté avait vu le jour, nous aurions de grands chercheurs en islamologie et on aurait pu même profiter de cette organisation pour former des imams. Le devenir de l'Europe et de l'islam est lié. En attendant que les lignes bougent, des organisations souterraines envahissent l'espace musulman.