dimanche 17 février 2013

Ils ont perdu la légitimité, ils perdront le pouvoir


Douze jours que Chokri Belaïd est décédé, douze jours que son tueur continue à jouir de sa liberté. Aujourd’hui, à Tunis, bénéficient de leur liberté les assassins, les pédophiles et les corrompus qui ont retourné leurs vestes. Pendant ce temps-là, anciens ministres et PDG continuent encore à croupir en prison, bien que le délai légal de détention soit dépassé. Paix à ton âme Chokri, ton sang sera vengé, un jour ou l’autre.

Cela fait douze jours que Hamadi Jebali a annoncé qu’il allait remanier son gouvernement pour « limoger » tous les ministres partisans et les remplacer par des technocrates. Douze jours après, on attend encore. On attend que les « affamés » du pouvoir lâchent la pression pour laisser le chef du gouvernement travailler et exercer pleinement sa mission, comme le lui dictent son devoir et sa conscience.
Depuis douze jours qu’ils nous rabâchent les oreilles avec leur légitimité, leur révolution et leur peuple.
Mais de quoi parlent-ils ces ministres du CPR et d’Ennahdha qui n’arrêtent pas d’insulter le chef du gouvernement ?
Leur légitimité est finie le 22 octobre 2012 à 23h59. Les membres de l’ANC qui les ont nommés, ont été élus pour un an, point barre. Ils ont été élus pour rédiger une Constitution et non pour modifier les lois et encore moins pour rallonger leur mandat. Dès lors, ils ne sont plus légalement légitimes et, s’ils sont là où ils sont, c’est par consensus et juste pour éviter le néant et le chaos qui s’en suivraient.

Dans son meeting d’hier, samedi 16 février, Rached Ghannouchi a évoqué à plusieurs reprises cette question de légitimité en parlant des urnes, du militantisme, des années de prison et du peuple.
Côté urnes, les délais légaux sont achevés.
Côté militantisme, ni Ennahdha, ni le CPR n’ont participé au 14-Janvier.
Côté prison, les membres d’Ennahdha n’ont jamais milité pour les libertés et la lutte contre la précarité, mais pour leurs idéaux et le projet d’islamisation de la société tunisienne.
Pour ce qui est du peuple, on l’a vu ces derniers jours. Malgré tous les appels, toutes les mosquées et toutes les mobilisations logistiques, matérielles et humaines, ils ont été incapables de rassembler plus de 20.000 personnes.
En face d’eux, l’enterrement de Chokri Belaïd a rassemblé à Tunis 1,4 million de personnes (premier chiffre donné par le ministère de l’Intérieur), soit autant que l’ensemble des citoyens qui ont voté Ennahdha le 23 octobre 2011.
Non, messieurs et mesdames les ministres du CPR et d’Ennahdha, vous n’avez plus de légitimité et vous n’avez nullement le droit de parler au nom du peuple.

Depuis l’annonce par Hamadi Jebali d’un gouvernement de compétences, une hystérie collective a gagné les différents dirigeants d’Ennahdha et du CPR. L’un déclare qu’il ne quittera l’ANC que mort et l’autre qui annonce qu’il ne quittera plus le pouvoir.
Abdelwahab Maâter semble carrément abattu, Slim Ben Hmidène est aux larmes et Sihem Badi est au bord de l’hystérie. Tout comme la Française d’origine tunisienne, Meherzia Laâbidi de son nom.
Tous, bien entendu, ont épinglé les symboles de l’ancien régime et les médias, leur grand dada ! De quels médias « neutres » veulent-ils ? De la Zitouna TV ou d’El Qalam ? S’il n’y avait pas ces « médias de la honte » (comme ils nous qualifient), l’opposition et la société civile n’auraient pas trouvé de relais auprès de l’opinion publique. On serait revenu comme avant où l’on ne parle que des trains qui arrivent à l’heure, du beau-temps et des oiseaux qui gazouillent.
Soyons sérieux messieurs, dames, un peu de dignité, cessez de chercher des boucs émissaires ! Prenez du recul, faites une autocritique comme vos collègues d’Ettakatol ou Abdelfattah Mourou et Samir Dilou. Au moins, taisez-vous comme Noureddine Bhiri ou inspirez-vous du président de la République qui n’a pas trouvé mieux, pour noyer son chagrin, que de s’occuper de la Corée du Nord et du Yémen !
Il s’agit là de l’avenir de la Tunisie, notre avenir à tous et cet avenir ne saurait se construire avec la mentalité de l’exclusion et du « j’y suis, j’y reste ».

Que reproche-t-on à Hamadi Jebali ? Il a voulu que ses ministères soient neutres, il a voulu qu’il n’y ait plus de ministres politiques partisans dans son gouvernement, après l’échec constaté de cette politique. Il a répondu à une demande pressante de l’opposition, de la société civile, des médias et des partenaires étrangers.
Que veulent deux des trois partis de la troïka ? Ils veulent continuer dans une politique qui a échoué, ils ne veulent rien changer, car (disent-ils) tout le monde se trompe sur le constat, sauf eux !
Ils veulent écarter les adversaires politiques, ils veulent faire taire les médias et intenter des procès contre ceux qui proposent un remaniement ou la dissolution de l’ANC.

En bref, les uns veulent unir toutes les forces vives du pays, les autres veulent écarter toutes les forces, sauf les leurs.
Dans ce tohu-bohu, Rached Ghannouchi sème l’amalgame et ne sait plus sur quel pied danser. Vendredi, il rencontre et serre la main de Hamadi Jebali, Béji Caïd Essebsi et Kamel Morjane, le lendemain, il  les dénigre d’une manière directe et indirecte.
Ce type de comportement dénote d’une chose : on est déboussolés. On ne sait plus quoi faire, on ne sait plus quelle option retenir.
Faut-il privilégier l’intérêt de la Tunisie ou l’intérêt du parti ?
Et si Rached Ghannouchi ne sait pas quoi faire, c’est à cause de ses ailes radicalement opposées au sein du Majlis Choura. Entre faucons et colombes, il est aujourd’hui au point de dire, en même temps, la chose et son contraire. En essayant de satisfaire tout le monde, il n’arrive à satisfaire personne.
Hamadi Jebali a su trancher pour ne satisfaire que sa conscience qui lui a dicté de privilégier l’intérêt du pays. Il s’est conduit en homme d’Etat.
Rached Ghannouchi doit faire de même et convaincre son Majlis choura de l’intérêt suprême de la nation. A défaut, il doit partir, sinon la Tunisie va s’embraser et il en sera responsable.
Pour se maintenir au pouvoir, il ne suffit pas d’être un homme politique, il faut être un homme d’Etat. Jusque là, Ghannouchi, ses ministres (et ses acolytes du CPR) sont loin d’être comme tels.

1 commentaire:

  1. Pour rafraîchir la mémoire à Ghannouchi qui semble prendre les tunisiens pour ce qu'ils ne sont pas, il peut revoir ce qu'il disait à propos de la légitimité dont se gargarisent les hommes de son partis, et ceux de la troïka au pouvoir :

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