jeudi 3 juillet 2014

Quels sont les buts de la mise en scène de l’invasion de l’Irak par l’EIIL ?

LES AMÉRICAINS ET LEUR DOUBLE LANGAGE : Ils disent lutter contre le terrorisme, alors qu'ils l'instrumentalisent et le soutiennent à des fins géopolitiques ! En cela, ils utilisent la même méthode que leurs protégés "Frères musulmans" !!
D’où leur idée de gouvernement de salut national ... autrement dit le fameux "consensus" qu'ils tentent d'imposer aux irakiens, mais aussi aux tunisiens pour associer au pouvoir leurs protégés islamistes et leur wahhabisme !

R.B


Amin Hoteit
Llibanais, analyste politique, expert en stratégie

Quels sont les buts de la mise en scène de l’invasion de l’Irak par l’EIIL ?

1. Général Hoteit, ne craignez-vous pas que Daech [EIIL : État Islamique en Irak et au levant] se déplace au  ?
Considérons les événements tels qu’ils sont et ne tombons pas dans les pièges des médias occidentaux qui nous laissent à penser que Daech est ce géant nanti d’une force contre laquelle nous ne pourrions résister. Ce n’est pas vrai.
2. Comment cela ?
Nous disposons de suffisamment de renseignements sur les forces de cette organisation. Les événements qui se sont succédés m’ont conduit à rédiger, il y a quelques jours, un article que j’ai intitulé « Mossoul : une mise en scène daechienne » [1]. Car nous avons bel et bien assisté à une mise en scène !
Savez-vous que 25 000 hommes de la police et de l’armée de l’État irakien étaient présents à Mossoul et que Daech ne comptait que 500 combattants ? Par conséquent, ce qui s’est passé à Mossoul n’était pas une guerre, mais un cas de  et de capitulation associé à une guerre médiatique menée par les chaines TV Al-Jazeera [qatarie] et Al-Arabiya [saoudienne], lesquelles chaines ont annoncé la capitulation de Mossoul six heures avant sa chute réelle ! Ceci, exactement comme elles avaient procédé pour Bab al-aziziya en Libye, annonçant la défaite de  trois jours avant qu’il ne tombe et sa mort trois jours avant qu’il ne soit assassiné.
Il faut savoir qu’en cas de « guerre psychologique », la règle veut qu’une bonne partie de la population, plongée dans le « brouillard médiatique », attend de savoir qui est le plus fort pour décider de quel côté se ranger. Il était donc évident que si les Irakiens des régions à prédominance sunnite des quatre provinces concernées [Ninawa, Salah Ad Din, Diyala, et Al-Anbar] avaient su que les forces attaquantes de Daech ne comptaient que 500 éléments face à 25 000, ils ne se seraient jamais résignés à leur servir de « couveuse ». Il fallait donc « exagérer » les forces de Daech pour en arriver à la situation souhaitée avant que le brouillard des médias complices ne se dissipe.
Daech, en tant qu’organisation, a été créée en Irak en 2004. Lorsque l’« incendie arabe » a été déclenché en Tunisie fin 2010, elle est restée cantonnée en Irak où elle a fini par compter, au grand maximum, 5200 éléments. Daech n’a été expédiée en Syrie qu’après le premier véto sino-russe d’Octobre 2011 et une fois que « Jabhat al-Nosra », créée spécialement pour alimenter la crise syrienne, s’est révélée incapable de renverser le gouvernement en place.
Il est de notoriété publique que Daech et Jabhat al-Nosra sont liées à l’organisation Al-Qaïda, elle-même créée par l’administration américaine, de l’aveu même de Mme Hilary Clinton [2]. C’est en Syrie que Daech est passée de 5200 à 7000 éléments en 2012, alors qu’elle en compte aujourd’hui 15 000 contre 10 000 en Irak, d’où 25 000 combattants au total.
3. Et voilà que Daech et Jabhat al-Nosra se battent en Syrie !
Non… tout cela relève de la « tactique » du maestro qui mène le jeu. Ainsi, nous avons appris ce midi [25 Juin] qu’à Abu Kamal [localité frontalière entre la Syrie et l'Irak] Al-Nosra a été obligée de déclarer son allégeance à Daech [3], pour la doter d’une « puissance cumulée » et faciliter sa besogne dans les provinces irakiennes. Et ceci, parce que le terrain principal de cette guerre s’est déplacé en Irak.
4. Qui commande Daech ?
C’est toujours le même maestro qui pense que le « contrat sécuritaire américano-irakien » qu’il a conçu [4][5], fera de l’Irak une colonie américaine qu’il dirigerait à distance depuis Washington. Mais il se trouve que trois ans après le retrait américain, l’Irak a cherché sa route, dictée par sa condition géopolitique ; autrement dit, celle qui le mène à une certaine harmonisation avec l’Iran et la Syrie. Résultat : les  sont furieux que l’Irak se rapproche de l’axe qui lui résiste, et les Pays du Golfe sont encore plus furieux contre Al-Maliki qui refuse de se plier à leurs diktats.
Ce qui s’est passé en Irak, est la conséquence de leur échec en Syrie ; surtout qu’Obama a sonné le glas de la prétendue opposition syrienne [sur CBS], en admettant publiquement qu’« il n’y a pas d’opposition syrienne capable de renverser le Président Al-Assad » [6].
L’administration américaine a donc admis son échec en Syrie, mais n’a pas abandonné son plan initial. Nuance ! Elle s’est donc déplacée vers l’Irak où ses intérêts se sont recoupés avec ceux de l’Arabie saoudite d’une part, du Qatar et de la Turquie d’autre part ; lesquels ont mis leurs désaccords de côté car ils se sont tous trouvés confrontés à une même catastrophe et à une même urgence : empêcher l’Irak de rejoindre le front du refus et donc, l’axe de la .
La question est : comment ont-ils procédé pour l’en empêcher ? Al-Maliki faisant partie de l’« Alliance nationale irakienne » habilitée, selon la Constitution, à former le gouvernement, ils lui ont mis en scène l’invasion daechienne ! Mais, aujourd’hui, nos renseignements disent que plus du tiers des sunnites de Mossoul et d’ailleurs se sont retournés, en à peine 24 heures, contre cette engeance qui a déplacé 750 000 des leurs ; ce qui correspond à un sunnite sur sept, le nombre de sunnites irakiens oscillant entre 5,5 et 6 millions.
Cette mise en scène daechienne a donc deux raisons : l’échec subi en Syrie, et aussi la lutte pour le pouvoir. Terroriser Al-Maliki ainsi que les membres de la coalition autorisée à décider de la Constitution et du Gouvernement, devrait permettre de proposer un gouvernement qui négligerait les résultats des dernières élections législatives. D’où la proposition d’un « Gouvernement de salut national » présentée par John Kerry [7][8].
Ce que suppose la proposition de John Kerry c’est, en effet, de mettre de côté les résultats des dernières élections législatives remportées par le bloc Al-Maliki et de distribuer le pouvoir à égalité entre les chiites, les sunnites et les kurdes; donc, sur une base confessionnelle et ethnique ! Ce qui reviendrait à un tiers pour les chiites [60 à 65% de la population], un tiers pour les sunnites [15 à 18% de la population], et un tiers pour les Kurdes [< 20% de la population]. Résultat : les deux-tiers sunnite et kurde sont aux mains des Pays du Golfe et des USA. Et, c’est le but de cette mise en scène en Irak !
5. Mais alors, comment devons-nous comprendre l’appel à l’aide des États-Unis de la part d’Al-Maliki [9] ?
C’était plutôt intelligent, étant donné le « contrat sécuritaire américano-irakien » qui stipule que si l’un des deux pays [ici, il s’agit évidemment de l’Irak] fait face à un danger menaçant son existence, ses frontières, son unité territoriale… à lui de demander à l’autre partie son aide dans les limites, le lieu et la durée qu’il aura fixés. Or, Al-Maliki sait parfaitement que les USA sont derrière toute cette opération, comme il sait que ni les Saoudiens, ni les Turcs n’auraient jamais osé encourager l’invasion daechienne sans que la décision, et non simplement l’accord, ne soit venus des États-Unis. Il les a donc appelés à l’aide !
Dans le cas où les États-Unis se seraient décidés à appliquer les termes de l’accord sécuritaire, ils envoyaient leur aviation. À ce propos, je vous fais part d’un sujet que je divulgue pour la première fois : lorsqu’Al-Maliki a parlé de bombardements US sur des centres de Daech dans la région d’Al-Anbar, ce n’était pas vrai ! Mais cela a obligé les États-Unis à démentir et a permis au Chef de l’alliance nationale irakienne, Ibrahim al-Jaafari, de rétorquer aux Américains qu’ils n’avaient rédigé leur accord sécuritaire bilatéral que dans leurs propres intérêts, puisqu’ils se sont abstenus de l’appliquer à la première occasion, ce qui autoriserait désormais l’Irak à le réviser et à faire face, par lui-même, aux dangers qui le menacent. D’où la « fatoua » prononcée aussi bien par les  religieuses chiites et sunnites contre cette mise en scène « dirigée pas les Américains en association avec la Turquie, le Qatar et l’Arabie saoudite »…
En pleine , tombe la nouvelle d’une explosion lors d’une perquisition dans un hôtel à  : 10 blessés [10] ; ce qui ramène le sujet vers la première question de cet extrait.
6. Général Hoteit, ne craignez-vous pas que DAECH se déplace au Liban ?
La réponse du Général Hoteit à ces actes terroristes qui frappent le Liban revient à dire qu’au Liban le système de Sécurité prend des coups mais ne cède pas ! Réponse développée, par ailleurs, dans un article du 26 Juin, dont voici les points essentiels [NdT].
  • L’occident tente de briser l’axe de la Résistance depuis l’an 2000. Il a commencé avec la Résolution 1559, est passé à la guerre de 2006, puis à la provocation de la discorde au Liban en 2008 et en Iran en 2009, pour ensuite s’attaquer à la Syrie en 2011, avant d’en arriver à l’Irak aujourd’hui ; dernière carte américano- sioniste… Par conséquent, nous pouvons nous demander si le passage à l’Irak, après fermeture de la frontière libano-syrienne, est la raison qui éloigne le Liban du feu de l’incendie. Sinon, est-il destiné à jouer un autre rôle?
  • Maintenant que l’Irak est devenu le théâtre principal de l’, nous pensons que l’Occident s’est légèrement mis en retrait de la Syrie devenue un théâtre auxiliaire, tandis que le Liban est désormais « le théâtre de pression » sur les composantes de l’axe de la Résistance en général, et sur le Hezbollah en particulier. Mais le problème de l’Occident réside dans son incapacité à pénétrer la société de la Résistance vu le bouclier de sécurité qui s’est formé autour d’elle. C’est pourquoi de nombreuses tentatives terroristes ont échoué les unes après les autres… [Celle-ci est passée].
  • Certes, les tentatives se répètent mais nous notons une nette baisse des niveaux de préparation et d’exécution, d’autant plus qu’il semble que la fabrication soit devenue locale depuis que les terroristes ont été privés de leurs « usines de la mort » dans le Qalamoun.
  • À ce stade, nous pouvons dire que l’échec de nombreuses autres tentatives terroristes est dû à l’incessante collaboration entre les institutions officielles de la Sécurité et de l’Armée libanaises d’une part, et les composantes de la société civile de la Résistance et des citoyens d’autre part. Ceci, sans oublier la complémentarité avec l’Armée arabe syrienne de l’autre côté de la frontière. Tant que cette coopération se poursuivra, la sécurité du Liban ne cédera pas, malgré les secousses causées par une attaque  ici ou là pour tenter de mettre fin à l’équation libanaise en vigueur : « Peuple, Armée, Résistance ».
7. Et que pensez-vous du danger qui guetterait la Jordanie ?
Daech a communiqué sa carte géographique qui correspond, en réalité, à un avertissement américain adressé à cinq pays, plus un sixième pour mystification !
Cette carte inclut l’Irak et le Koweït à l’Est, la Syrie et la Jordanie au centre, le Liban et la Palestine occupée à l’Ouest. Bien évidemment, Israël n’est pas concerné par Daech, car le haut commandement de Daech est américain et soucieux de ses intérêts. Par conséquent, ni le commandant, ni Daech ne porteront atteinte à Israël.
Le Koweit a été ajouté à la carte, car certaines informations ont fait état de ses tentatives de retour vers la Syrie et l’Iran depuis « l’échec du projet ». L’avertissement est venu lui dire : ne bouge pas !
La Jordanie, qui a été la carte maîtresse de la guerre contre la Syrie tout le temps où Bandar Bin Sultan était à l’œuvre, hésite à son tour. Elle a reçu l’avertissement [mais c’est une autre histoire, NdT]
Le Liban est sur la carte depuis le début. Ceux qui prétendent le contraire doivent avoir des informations directes à partir des chambres opératoires dirigées par les États-Unis, les sionistes, les jordaniens ou les Pays du Golfe, que nous n’avons pas !
8. Finalement, et vu le scénario que vous venez de nous décrire, ne craignez-vous pas une guerre régionale ?
Une guerre traditionnelle, dont Israël ferait partie en envoyant ses propres soldats se battre sur tous les fronts n’est pas à l’horizon, ni au Liban, ni au Golan, ni en Iran. Si une telle guerre était possible, Israël n’aurait pas attendu 8 ans pour lancer sa guerre !

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