jeudi 18 janvier 2018

Les liaisons dangereuses des laïcs avec les islamistes

La bête noire des américains étant le communisme, ils l’ont combattu et aidé à le combattre partout dans le monde. Le monde dit arabo-musulman n’a pas échappé à cette injonction d’éradiquer le communisme chez eux. En pleine guerre froide, et pour donner le change au monde qui s’inquiète des dérives dictatoriales des "pères de la nation" des pays nouvellement libérés du colonialisme, les américains ont "fortement recommandé" le pluralisme à ces présidents en autorisant l’ouverture à l’islamisme tout en continuant à combattre le communisme. Leur choix s'est porté sur l'organisation des Frères musulmans pas par hasard. Outre que les "Frères" n'aiment pas le communisme, ils s'opposent aussi au pan arabisme qui est anti-impérialiste et tiers-mondiste. 
Leur hantise du communisme ira jusqu’à déclencher la guerre en Afghanistan pour contrer sa progression en instrumentalisant l'islamisme et le wahhabisme qui le fonde.
En somme les américains ont préféré le péril vert au péril rouge, persuadés cyniquement ou par ignorance que l’islamisme se cantonnera aux pays "arabo-musulmans" !
Le 11 septembre 2002 le monde entier découvre l’horreur de l'islamisme et l'erreur stratégique des américains. A jouer avec le feu, celui-ci a fini par se retourner contre eux.
Et depuis, les occidentaux découvrent l’ampleur du péril vert aussi bien dans les pays "arabo-musulmans" que chez eux !
Avec le "Printemps arabe", les islamistes ont pris le pouvoir avec le soutien du Qatar et l’aval des EU & UE ! Et à nouveau, l’Occident découvre le cynisme de ses dirigeants de vouloir imposer les Frères musulmans aux Républiques qui aspirent à la laïcité ; puisque Ghannouchi transformera la Tunisie en premier pays exportateur de terroristes en Europe, où ses enfants sont souvent associés aux actes terroristes barbares !
Les dirigeants occidentaux seront bien inspirés de cesser leur jeu dangereux avec les islamistes et de soutenir les progressistes et les laïcs qui aspirent aux libertés dont jouissent les occidentaux !
Si l’Afghanistan, le Pakistan et leurs Talibans,… sont trop loin pour imaginer qu’ils puissent nuire aux européens, faut-il rappeler aux responsables politiques de l’UE que le terrorisme est désormais aux portes de l’Europe, la Tunisie étant devenue le premier pays exportateur de terroristes depuis qu'ils ont imposé les Frères musulmans aux tunisiens ?
R.B
Résultat de recherche d'images pour "nicolas beau photos"

L’alliance objective entre le chef du mouvement islamiste, Rached Ghannouchi et le chef de l’état, le bourguibiste Beji Caïd Essebsi, ne peut se comprendre si l’on ne prend pas la mesure des compromis qui ont toujours existé en Tunisie entre le pouvoir et les Frères Musulmans.

Contrairement à une vision manichéenne de l’histoire tunisienne où les deux Présidents Bourguiba et Ben Ali auraient été des remparts contre l’islamisme qu’iis auraient réprimé de façon constante, le pouvoir en Tunisie a régulièrement tenté de trouver des formes de compromis avec l’Islam politique. Cette culture de la négociation qui a coexisté avec les formes les plus brutales de la répression éclaire les ressorts de la transition démocratique relativement maîtrisée que l’on connaît en Tunisie depuis la fuite de l’ex président Ben Ali vers l’Arabie Saoudite le 14 janvier 2011.

Le mouvement islamiste tunisien n’est pas né d’hier. Dès la fin des années 60, le chef d’Ennahdha, Rachid Ghannouchi, s’engageait en faveur de l’islamisme, après des détours par le Nassérisme lors d’un séjour au Caire et par le baas syrien à l’occasion d’un voyage à Damas, où il rencontre les Frères Musulmans. Sous Bourguiba comme sous Ben Ali, les deux présidents que connaît la Tunisie jusqu’aux journées révolutionnaires de janvier 2011, le pouvoir va vivre des phases de compromis avec les islamistes, avant de revenir à de longues périodes de répression.

Ainsi s’est forgé l’identité du mouvement islamiste, depuis un demi-siècle, dans les prisons tunisiennes certes, mais aussi dans les antichambres des Palais nationaux. Depuis l’Indépendance de la Tunisie, 30000 militants auront été emprisonnés et torturés de la pire des façons, forgeant des solidarités qui sont encore aujourd’hui l’ossature du mouvement islamiste Ennahdha. Mais certaines ouvertures politiques aussi bien sous Bourguiba que sous Ben Ali vont permettre aux patrons de Nahda de se frotter au pouvoir, de s’initier au pluralisme et peut-être d’apprivoiser les valeurs démocratiques. L’existence du fameux code du statut personnel tunisien, qui donne à la Tunisienne des droits qui n’existent nulle part ailleurs dans le monde arabe et méditerranée, a été admise par Rached Ghannouchi, le chef incontesté de l’islamisme tunisien, dès 1988. Ce n’est pas rien !

Des islamistes instrumentalisés

Le régime de Bourguiba a toujours été traversé de courants contradictoires. Certains des fidèles de l’ancien chef de l’Etat, comme Mohammed Sayah, mémorialiste du règne et dauphin présumé, n’ont cessé de combattre les agissements des fondamentalistes musulmans. A l’instar de Bourguiba lui-même qui, dardant la foule de ses yeux bleus, place de la Casbah à Tunis prenait un malin plaisir à siroter un jus d’orage en plein mois de ramadan. « La guerre menée contre le sous-développement est une vraie guerre sainte qui exempte le musulman de respecter le jeune ».

Dans les années 80, les islamistes tunisiens ont été utilisés par le pouvoir bourguibiste, comme un possible contre feu face à l’opposition progressiste et marxiste. Dès 1969, au moment où se tiennent les grands procès contre l’extrême gauche, la création « l’association de sauvegarde du Coran », première manifestation de l’islamisme en Tunisie, est encouragée en sous-main par le régime. On y retrouve les deux fondateurs d’Ennahdha, Mourou et Ghannouchi. Mieux, les premières revues fondamentalistes, la connaissance et la société sont imprimées sur les rotatives de la SAGEP, une société dépendant du PSD, le parti destourien au pouvoir. Fondateur du MTI.

Premières vagues de répression

Dès 1978, se crée dans les universités tunisiennes le Mouvement de la Tendance Islamique (MTI), ancêtre d’Ennahdha. Un an plus tard à peine, les islamistes organisent des manifestations monstres sur les campus pour marquer les débuts du 15eme siècle de l’Hégire. « L’Histoire, déclare « le Cheikh », qui aura été tout à tout marqué par le nassérisme, les baas syrien puis les Frères Musulmans, passera en ce siècle de la défensive à l’attaque, ce sera le siècle de l’Etat islamique ». Ce radicalisme provoque une première vague de répression, qui n’empêche pas les dirigeants du MTI, désireux de s’inscrire dans le paysage politique, de déposer une demande de reconnaissance de leur mouvement en 1981. « C’est moi, raconte l’avocat Mourou, un des vice-présidents actuels du mouvement, qui aie déposé en 1981 le récépissé pour la légalisation du MTI, le fonctionnaire a opposé un tampon rouge. J’ai conservé les récépissés dans mon coffre à la maison ».

C’est seulement à leur sortie de prison en 1984 que les principaux responsables du MTI commencent à composer avec le pouvoir. Élargi durant l’été, Ghannouchi poursuit ses études de théologie à Tunis, toujours entouré d’une nuée de disciples. C’est l’époque où il commence à se faire appeler « le Cheikh » (Chef religieux). Ce qui lui vaut d’être convoqué par le Secrétaire d’Etat à la Sûreté, un certain Ben Ali. A l’époque, Mohamed Mzali vient d’être nommé Premier ministre ; l’heure est à l’ouverture vers les nationalistes arabes et les religieux.
- « Pourquoi te rends tu ainsi à l’université ? », demande le général Ben Ali à Ghannouchi
- « Je suis étudiant en théologie, c’est normal », répond ce dernier
- « Impossible, tu sèmes le trouble, tu dois faire autre chose », poursuit Ben Ali
« Je suis libre, l’Université ne fait pas partie de la zone militaire de Tunis », rétorque le leader du MTI, qui se lance dans une tirade sur la nécessité de légaliser son mouvement. Au point qu’il en oublie de boire le café qu’il a devant lui. « Tu ne bois pas, lui demande Ben Ali, tu as peur d’être empoisonné sans doute ».
Finalement, l’étudiant attardé qu’est Ghannouchi boit son café, poursuit ses études et apprend à passer un premier compromis avec le pouvoir. Ce ne sera pas le seul.

La tentation du légalisme

Une partie des cadres du mouvement commence à intégrer les règles du pluralisme au sein de la Ligue des droits de l’homme et de l’UGTT, le grand syndicat tunisien. Avec son aura, Rached Ghannouchi a accompagné le cheminement du MTI vers plus de légalisme. Au point d’être reçu, le 11 septembre 1985 par le Premier ministre Mohamed Mzali. Le mouvement profite de l’ouverture du pouvoir pour étendre son influence.

Déjà, les « cercles » se développent dans les mosquées où, sous prétexte d’interpréter un verset coranique, les Imams développent de fines analyses politiques. Toute une génération d’étudiants, qui va militer au sein de l’UGTE, le syndicat clandestin, profite de cet enseignement et accroît son influence.

A partir de 1986, la menace islamiste est ressentie par un Bourguiba vieillissant comme la menace principale. Nommé ministre de l’Intérieur puis Premier ministre et intime de la nièce du Combattant suprême, qui filtre les entrées au Palais de Carthage, Ben Ali va jouer habilement de cette menace

La répression s’accentue, Ghannouchi est à nouveau emprisonné, mais il ne sera jamais torturé par les sbires de Ben Ali, alors ministre de l’Intérieur. Ce dernier sauvera même sa tête que réclame, durant l’été 2007, un Bourguiba pris de panique. C’est la preuve que du côté de l’appareil sécuritaire on maintient toujours des passerelles vers la mouvance islamsite, fut-elle en prison

En l’absence de Ghannouchi emprisonné, e nouveau patron du mouvement, Salah Karker, entre dans la clandestinité. La ligne dure l’emporte, un coup d’état islamiste est même prévu pour le 8 novembre 2007, selon les confidences de Karker à l’auteur de ces lignes. Ce qui est cocasse, c’est qu’encore maintenant l’entourage de Ghannouchi conteste la réalité du projet de prise de pouvoir par la violence. C’est dire l’ampleur des désaccords historiques au sein de la mouvance islamiste.

Première transition tunisienne, 1987-1990

A l’époque, Ben Ali avait-il été prévenu des intentions du MTI ? Le 7 novembre 1987 en tout cas, le premier ministre de Bourguiba renverse son mentor, prend le pouvoir, libéralise le régime et reçoit, quinze jours après son accession au Palais de Carthage, une longue missive de Ghannouchi, encore en prison. « Si vous venez sauver le pays et amener la réconciliation générale, lui écrit-il en substance, vous me trouverez comme un soldat à vos côtés ». Le leader du MTI est libéré et dans la foulée, 2400 détenus politiques sont élargis.

Les islamistes mettent de l’eau dans leur vin. Son parti prend le nom d’Ennahdha (La Renaissance) dont toute connotation religieuse est exclue. Ghannouchi et Ben Ali se rencontrent le 7 novembre 1988. Le lendemain, un Pacte National est signé par les représentants de tous les partis, y compris celui d’Ennahdha.

La lune de miel est de courte durée. Très vite après les élections législatives de 1989, Ben Ali entre dans une ère de répression féroce contre les islamistes. Ghannouchi s’exile à Londres et la confrontation durera presqu’un quart de siècle. Du moins jusqu’à ces deux dernières années où de discrets contacts ont été pris entre Ennahdha et les proches de Ben Ali, comme son gendre et dauphin présumé, le très religieux Sakher Materi, aujourd’hui réfugié au Qatar.

Le compromis de 2008-2010

A la fin du règne de Ben Ali, de nombreux islamistes sont à nouveau libérés ; certains reviennent d’exil. La négociation commence dès le début 2005, avec certains islamistes. L’ancien Premier ministre de Bourguiba, Mzali, rentre d’exil, lui qui a eu une certaine tolérance vis à vis de l’islam politique. Certains « modérés » de cette mouvance comme Ahmed Manaï, auteur du « jardin des supplices » (La Découverte), où il raconte les tortures infligées par les sbires de Ben Ali, rentrent au pays

Dans un premier temps Ennahdha va poursuivre la lutte en s’alliant notamment avec le PCOT de Hamma Hammami en 2005.

Mais à partir de 20008 et 2009, Ghannouchi accepte le principe de la recherche d’un compromis. Au sein d’Ennahdha, la tentation existe d’un nouveau compromis avec le régime honni. Jusqu’à l’immolation d’un obscur vendeur à la sauvette, en décembre 2011 à Sidi Bouzid. C’est l’étincelle qui va embraser le pays, forcer Ben Ali à la fuite et finalement porter les islamistes au pouvoir.
Mais dans la semaine qui précède son départ précipité, Ben Ali essaie de composer et reçoit un envoyé spécial de Ghannouchi, Jebali, qui a été libéré de prison et deviendra plus tard en 2012 le Premier ministre tunisien

A ce stade, les islamsises d’Ennahdha sont dans une phase de négociation avec le pouvoir. Ils ne participeront pas en tant que tels aux journées de contestation violente. Ils ont trop peur que Ben Ali use de la manière forte et les envoie à nouveau massivement en prison.

C’est là l’explication du contre sens qui va être fait en Europe et partout dans le monde sur la Révolution tunisienne. Aucun slogan religieux, aucune présence militante islamiste dans les rassemblements qui se multiplient durant le mois de janvier 2011. D’où le sentiment que l’islam politique est mort en Tunisie. Et cette impression va perdurer durant toute l’année 2011, du moins jusqu’à l’élection de l’Assemblée constituante en octobre qui va donner plus de 40%¨des sièges à Ennahdha et la majorité absolue aux islamistes et à leurs alliés du CPR, le mouvement de Marzougui qui, dans la foulée et avec l’onction des islamistes, devient le premier président de la République de la Tunisie nouvelle.



L’alliance scellée entre le patron d’Ennahdha, Rached Ghannouchi et le chef de l’état, Beji Caïd Essebsi, n’aurait jamais existé si les islamistes n’avaient pas appris les règles du jeu politique en participant au gouvernement en 2012 et 2013

« Nos élus feraient mieux de s’occuper des vraies questions au lieu de perdre leurs temps à argumenter sur la protection du sacré ou la complémentarité entre les sexes ! Ils ont pour mission de rédiger une Constitution qui garantisse les droits et les libertés et nous fournisse un socle sur lequel construire un État civil et démocratique. » Un an après les élections d’octobre 2011 qui ont porté le parti Ennahdha au pouvoir, Samir Dilou, ministre des Droits de l’homme et de la Justice transitionnelle et porte-parole du gouvernement de l’islamiste Hamadi Jebali, ne mâchait pas ses mots face au journaliste qui l’interrogeait.  Les Tunisiens, poursuivait-il, « ont fait la révolution pour conquérir la liberté, pas pour changer de mode de vie ».

Des réelles divergences ont toujours existé au sein du parti islamiste tunisien dont l’échiquier interne va des tenants du modèle turc aux sympathisants salafistes. Les patrons d’Ennahdha ont appris les règles du pluralisme démocratique au sein même de leur mouvement

Le fonctionnement du parti islamiste s’apparente en réalité au centralisme démocratique des belles années du communisme : des débats houleux à la base, des courants qui s’expriment, des sensibilités opposées, des egos qui prospèrent, des votes enfin qui départagent les concurrents. La synthèse est dégagée au sommet grâce à l’art du consensus et de la dialectique du cheikh du parti islamiste, Rached Ghannouchi. Ses arbitrages sont ensuite relayés sans états d’âme. « De véritables éléments de langage, constate un diplomate occidental, apparaissent dans les discours que nous tiennent les principaux dirigeants d’Ennahdha »

Cette capacité à élaborer un consensus ne doit pas masquer la complexité des rapports de force. Nombreuses et subtiles, les lignes de fracture qui traversent la mouvance nahdhaouie sont de trois ordres : historiques, idéologiques, régionalistes. On assiste à des oppositions, voire des conflits, entre les exilés, comme Ghannouchi, et les dirigeants islamistes qui ont connu la prison, la torture ou encore l’isolement. Des conflits peuvent exister en second lieu entre les modernistes et les passéistes, comme Sadok Chourou, le président du majlis al-Choura et le plus salafiste des élus de l’Assemblée nationale constituante.

Enfin, les affinités régionales opposent les sudistes, qui ont fourni de gros bataillons d’électeurs au parti, à ceux des banlieues de Tunis, du Kef ou de Kasserine. Que dire de l’appartenance du Premier ministre Hamadi Jebali à la région du Sahel, le fief de Bourguiba d’où sont originaires, depuis l’indépendance, les dirigeants de la Tunisie ? Cette identité régionale lui a permis de nouer de discrets contacts avec quelques personnalités de l’autre camp, notamment avec Kamel Eltaïef.

Les exilés et les autres

Les plus fortes incompréhensions au sein du mouvement existent entre ceux qui ont choisi l’exil et ceux qui, restés en Tunisie, ont connu la prison et la torture. Des solidarités sont nées durant ces années, des clivages persistent. Ce n’est pas un hasard si les fidèles collaborateurs du cheikh d’Ennahdha comme Lofti Zitoun, conseiller du Premier ministre auprès duquel il sera l’œil de Ghannouchi jusqu’à sa démission en février 2013, ou Ameur Larayedh, chef du bureau politique du parti, sont des exilés eux aussi pendant les années noires.

Le comité d’une cinquantaine de militants qu’il désigne peu après son retour en Tunisie durant l’hiver 2011 est constitué presque uniquement d’anciens détenus. Face au Guide, Hamadi Jebali, Premier ministre, ou Ali Larayedh, son ministre de l’Intérieur, ont la légitimité de leurs années de cauchemar pénitentiaire. C’est en partie afin de mieux les contrer que le Cheikh cultive des liens ambigus avec la mouvance salafiste. Les mille excuses qu’il trouve aux extrémistes, au sein du mouvement ou à l’extérieur, ont d’abord pour but de conforter son pouvoir.

La main tendue aux radicaux

Autres alliés de poids pour Ghannouchi, qui font partie des « faucons » d’Ennahdha, les anciens étudiants de l’Union générale tunisienne des étudiants, le syndicat islamiste réprimé par Ben Ali, sont choyés par le Guide. C’est le cas d’Abdelkarim Harouni, fondateur du syndicat, qui deviendra ministre des Transports dans le gouvernement de Jebali, ou encore d’Abdelatif el-Maki, ministre de la Santé dans ce même cabinet, un moment donné comme possible successeur de Jebali à la primature. El-Maki est de ceux qui ont obtenu le plus de voix pour entrer au majlis al-Choura lors du congrès de juillet 2012.

Pendant toute l’année 2012, une lutte d’influence souterraine oppose Ghannouchi aux pragmatiques qui gèrent l’action gouvernementale. Les arbitrages ultimes ne se prennent pas lors du conseil des ministres. La réalité du pouvoir est ailleurs. Deux fois par semaine, après la prière du matin, le chef suprême d’Ennahdha et le Premier ministre ont un entretien. Hamadi Jebali est le plus souvent renvoyé dans ses cordes par un Ghannouchi devenu une sorte d’omniprésident, qui tire dans l’ombre les ficelles de la machine gouvernementale. Ce qui n’est pas un gage d’efficacité, ce que l’entourage de Ghannouchi reconnait aujourd’hui en 2018.

Dissensions chez les Nahdhaouis

Les dissensions entre Jebali et les faucons du parti, souvent soutenus par Ghannouchi, vont s’aggraver au fil des mois. Car le Premier ministre, après des débuts peu encourageants, a pris la mesure de la gravité de la situation économique – 3 milliards de dinars (1,3 milliards d’euros) ont été retirés du système bancaire dans la période qui a suivi l’arrivée des islamistes au pouvoir – et des attentes de la population, dans un pays miné par le chômage. Il a compris qu’il lui fallait élargir sa base politique et tenter de composer une équipe gouvernementale plus compétente, écarter à tout le moins les plus désastreux de ses membres. Mais Ghannouchi oppose une fin de non-recevoir à ce projet de remaniement ministériel.

Au lendemain de l’assassinat de Chokri Belaid en février 2013, Jebali revient à la charge et propose la formation d’un « gouvernement de compétences » afin de gérer les affaires courantes jusqu’aux prochaines élections. Il annonce qu’il donnera sa démission si ce gouvernement ne voit pas le jour. Ce qu’il fera finalement devant le refus des instances dirigeantes d’Ennahdha. Hamadi Jebali, comme Samir Dilou, plaide pour que le caractère pluraliste de la Tunisie soit pris en compte. Après plusieurs mois passés à la primature, il sait aussi qu’Ennahdha n’a pas une expérience suffisante du pouvoir pour faire face, seul, aux défis de la Tunisie. Pour les faucons du parti et, à ce moment-là encore, pour Rached Ghannouchi, Ennahdha, consacré premier parti de Tunisie par les électeurs en octobre 2013, a le droit de régner sans partage.

Des voix modérées

Autre pomme de discorde entre les différents courants nahdhaouis : l’attitude à avoir vis-à-vis des salafistes. Les plus radicaux les considèrent comme une mouvance à la fois idéologiquement proche et concurrente sur le marché de l’islam politique. D’autres au contraire mettent en garde contre les dangers d’une complaisance coupable. Parmi eux, quelqu’un dont la voix porte au sein du parti : Abdelfattah Mourou, cofondateur en 1989, avec Rached Ghannouchi, du Mouvement de la tendance islamique, l’ancêtre d’Ennahdha, brillamment élu vice-président du mouvement lors du congrès de juillet 2012. « Après le 14 janvier, regrette-t-il, des jeunes et les anciens détenus ont été seuls à être cooptés au sein d’un comité de cinquante-sept personnes. Je n’en étais pas. Un seul critère semblait l’emporter, le nombre d’années passées en prison. » Une exclusion qui le conduira à se présenter aux élections d’octobre 2011 sur une liste indépendante.

En nous recevant en janvier 2013, les propos qu’il tient à l’égard de son mouvement, sont sévères : « Je suis véritablement inquiet de la position adoptée par Ennahdha à l’égard des salafistes. Et je le leur ai clairement dit. Lorsque ces extrémistes s’en prennent violemment à des citoyens tunisiens, cela n’est pas acceptable. Je leur ai dit : “Vous gouvernez depuis des mois, vous devez agir contre ce fléau salafiste, cet islamisme de droite qui gangrène la société”. » Pour ce dialecticien habile, que ses adversaires décrivent parfois comme un tartufe, « le mouvement de prédication qu’a été Ennahdha doit se transformer en mouvement politique ». En août 2012, alors qu’il donnait à Kairouan une conférence sur « la tolérance en islam », il a été violemment agressé par un jeune extrémiste, furieux de l’entendre défendre la liberté de parole des intervenants.

Autre voix modérée, celle d’Habib Mokni. Rond et consensuel, il est l’un des rares à réfléchir sur les raisons de l’échec d’Ennahdha, animant un vif courant de contestation au sein du mouvement. Lui, estime qu’Ennahdha a voulu aller trop vite en se positionnant, dès le départ de Ben Ali en janvier 2011, comme candidat au pouvoir : « Après tant d’années de clandestinité, il fallait faire le point sur nos positions en organisant un congrès. Or, dès son retour, Ghannouchi a fait un coup de force, un putsch, en créant ce bureau d’une cinquantaine de militants choisis par lui. Ghannouchi était assoiffé de pouvoir, mais il ne pouvait pas et ne devait pas gouverner tout de suite. C’était prématuré, trop risqué, nous n’étions pas aptes, après toutes ces années de répression. Il fallait d’abord faire notre propre bilan, savoir pourquoi Ben Ali était parti. Sauver le pays et non partir en guerre. »

L’accord avec Béji, déjà !

Ghannouchi finira par accepter, début 2014, de s’éloigner du pouvoir dans l’espoir sans doute de permettre à Ennahdha de se refaire une virginité et de mieux rebondir lors des élections prochaines. Et d’éviter de faire les frais d’un scénario à l’égyptienne – l’éviction par l’armée des Frères musulmans portés au pouvoir par les urnes. Une décision soutenue par les pragmatiques du mouvement comme Hamadi Jebali ou Habib Mokni, avec lesquels le Cheikh a renoué, mais critiquée par les plus radicaux. Ces derniers, emmenés par Sadok Chourou et Habib Ellouze, reprochent aussi à Ghannouchi sa rencontre avec Béji Caïd Essebsi, à la mi-août 2013 à Paris, et son recul sur la charia, qui ne sera finalement pas mentionnée comme référence principale du droit dans la Constitution promulguée le 26 janvier 2014. Et ils ne manquent aucune occasion de lui rappeler que le pouvoir réel, au sein du parti, appartient au majlis al-Choura.

Ces dissensions internes brouillent le projet islamiste. On aurait cependant tort de croire que celui-ci n’existe pas. Pour Michaël Ayari, analyste à l’International Crisis Group, c’est avant tout son « conservatisme » qui caractérise le programme d’Ennahdha : « La plupart des responsables de ce mouvement poursuivent des objectifs modérés : une islamisation de basse intensité de la société tunisienne, un renouvellement profond des élites, un partage de la rente pétrolière grâce à des relations privilégiées avec les pays du Golfe, le Qatar et l’Arabie saoudite, et une économie libérale, à l’image du projet islamiste en Turquie. »


Après vingt-trois années de soutien au régime anti islamiste de l’ex président Ben Ali, la diplomatie française sous Sarkozy, puis sous Hollande, a déroulé le tapis rouge devant le patron d’Ennahdha, Rached Ghannouchi. 

« Un trou noir ». Voici l’expression brutale utilisée au Quai d’Orsay pour décrire l’anéantissement des autorités françaises lors de la fuite de « notre ami Ben Ali » en Arabie saoudite le 14 janvier 2011. Après vingt-trois années de complaisance avec le régime ultra-autoritaire qui régna à Tunis, la diplomatie française est condamnée à tourner la page. Ce qui fut fait à la hussarde, alors que Nicolas Sarkozy était encore au pouvoir. Après le choc du printemps arabe, la diplomatie française tente de ne pas renouveler les erreurs du passé et s’ouvre à toutes les tendances de la classe politique tunisienne, y compris au mouvement Ennahdha.

« Les islamistes, c’est un peu comme les rhumatismes lorsqu’on vieillit, il faut apprendre à vivre avec. » Cette confidence de l’actuel président tunisien, Béji Caïd Essebsi, à l’ancien ambassadeur de France Boris Boillon s’applique parfaitement au cours de la diplomatie française qui a vraiment accompagné les islamsites au pouvoir en 2012 et 2013.

Nos amis qataris

L’alliance privilégiée de Nicolas Sarkozy avec l’émir du Qatar, Hamad ben Khalifa al-Thani, avec lequel le président français avait déclaré la guerre à la Libye de Mouammar Kadhafi en juillet 2011, conforte encore le revirement des autorités françaises. Après tout, l’émirat du Qatar est le protecteur officiel des Frères musulmans dans le monde entier et notamment en Tunisie. Pourquoi combattre les amis de nos amis qataris ?

Le 20 avril 2011, le ministre des Affaires étrangères de Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, en voyage officiel à Tunis, rend publique cette approche radicalement nouvelle du monde arabe et méditerranéen. « Nous, Français, pensions très bien connaître les pays arabes, déclare le ministre, nous en ignorions des pans entiers. » Et d’ajouter : « Trop longtemps, nous avons brandi la menace islamiste pour justifier une certaine complaisance à l’égard des gouvernements qui bafouaient la liberté. » Beaucoup de hauts fonctionnaires français, naturellement, vont traîner des pieds à l’idée d’aider les « intégristes » tunisiens. « Certains, durant les réunions ministérielles sur la Tunisie, explique un conseiller socialiste du ministère français des Finances, semblent penser que la France est trop appauvrie pour se payer le luxe d’aider les barbus tunisiens. »

Des néoconservateurs aux Frères Musulmans

Nouvel ambassadeur de France en Tunisie après le départ de Ben Ali et proche de l’ex-chef de l’État français dont il fut le conseiller à l’Élysée, Boris Boillon défendra la cause des islamistes tunisiens avec la même vigueur qu’il avait pour soutenir la cause des néoconservateurs américains en Irak où il avait été nommé précédemment.

L’heure est à l’apaisement avec le nouveau régime. Une noria de personnalités politiques qui avaient leur rond de serviette au palais de Carthage font le voyage de Tunis pour chanter les louanges de la révolution. Parmi ces nouveaux convertis, on découvre Éric Besson, le ministre de l’Industrie de Sarkozy, Frédéric Mitterrand, chargé du ministère de la Culture dans le même gouvernement, ou Bertrand Delanoë, alors maire de Paris, qui fut longtemps proche du régime de Ben Ali. « C’est l’époque où l’ambassadeur Boris Boillon, explique un diplomate français, se vantait de recevoir un ministre français par jour, même si ces huiles ne connaissaient rien aux dossiers tunisiens. »

Hasard de calendrier  

Après l’élection de l’Assemblée constituante en octobre 2011, la nomination d’un gouvernement dominé par le mouvement Ennahdha ne change rien au nouveau cours de la politique française. À peine nommé le 24 décembre 2011, l’ancien Premier ministre islamiste Hamadi Jebali demande même à la France de l’aider à former une équipe de communicants pour améliorer son image. Après son départ du pouvoir en juin 2012, Nicolas Sarkozy maintient des liens étroits avec la mouvance des Frères musulmans, qu’il s’agisse du Qatar ou de la Tunisie.

Lorsque, le 28 juin 2012, le Premier ministre tunisien, Hamadi Jebali, rend une visite éclair en France pour rencontrer Jean-Marc Ayrault, qui vient d’être nommé à Matignon, le dirigeant historique d’Ennahdha trouve le temps d’avoir un entretien privé avec l’ancien chef de l’État français dans un discret appartement de l’ouest parisien. Quelques jours auparavant, un ancien Premier ministre kadhafiste, Baghdadi al-Mahmoudi, dont les avocats accusaient Nicolas Sarkozy des pires frasques financières, avait été extradé vers Tripoli par le gouvernement Jebali.

De Sarkozy à Fabius

L’élection de François Hollande en mai 2012 ne change pas radicalement les relations de la France avec la troïka qui est désormais au pouvoir en Tunisie. D’autant plus qu’aux côtés du Cheikh islamiste, Rached Ghannouchi, et de Moncef Marzougui, le chef de l’État inféodé à Ennahdha, se trouve Mustapha Ben Jaâfar, le président de l’Assemblée constituante, qui a côtoyé François Hollande au sein de l’Internationale socialiste. Dans une note confidentielle adressée le 6 septembre 2012 au président de la Commission du livre blanc sur la défense, chargée de dessiner les grands axes de la diplomatie et de la défense françaises pour les années à venir, l’ancien diplomate et universitaire Jean-Pierre Filiu exprime la position officielle de l’administration française face au « printemps arabe » : « Les révolutions politiques et sociales dans le monde arabe ne font que commencer et elles vont profondément transformer l’environnement de sécurité de la France. D’autres pays peuvent se permettre de contempler passivement ce processus, voire d’essayer d’en saper la dynamique révolutionnaire. Le seul choix d’avenir est pourtant d’accompagner ce mouvement historique, sans complaisance, mais avec sérénité. Le monde arabe qui en émergera sera plus juste, donc plus stable et plus prospère. » À contempler aujourd’hui l’état de régression qui règne en Libye, en Syrie et en Égypte, l’expertise française du moment paraît bien optimiste.

Mais peu importe, tout continue à être fait pour aplanir les relations entre la France et la Tunisie. Pour peu qu’un groupe de salafistes donne l’assaut à l’ambassade américaine en octobre 2012, les diplomates français, dirigés désormais par cet autre ami du Qatar qu’est Laurent Fabius en demandent quelques explications au chef d’Ennahdha, sans agressivité cependant, contrairement aux États-Unis rendus fous furieux par cette violente attaque. « Les salafistes sont des brebis égarées, explique alors Rached Ghannouchi aux chancelleries occidentales, nous étions absents de la vie politique sous Ben Ali, exilés ou en prison, lorsque ces jeunes se sont convertis à un islam radical. Nous faisons en sorte désormais qu’ils apprennent à boire le lait des valeurs démocratiques et nous les réprimerons s’ils franchissent des lignes jaunes. » De tels propos traduisent-ils un dangereux double discours, comme les adversaires de Ghannouchi le prétendent ? Ou est-ce la preuve d’un art consommé de la dialectique chez le fin politique qu’est le leader d’Ennahdha ? Du côté français, il n’est en tout cas pas question de faire le moindre procès d’intention aux islamistes.

Consensus toute

La neutralité de la France est incarnée avec doigté par un diplomate arabisant et l’un des plus expérimentés du Quai d’Orsay, François Gouyette. Cet ambassadeur consensuel et prudent est fort capable de prendre un petit déjeuner avec Rached Ghannouchi, de s’autoriser une rapide escapade, rue de Palestine, au local du Parti des travailleurs tunisiens qui représente la gauche tunisienne, puis de dîner, le soir, à une bonne table de Gammarth ou de La Marsa avec des hommes d’affaires plus ou moins nostalgiques de l’ère Ben Ali. Lorsque les islamistes décident de quitter le gouvernement en janvier 2014, l’ambassadeur de France ne manque pas une occasion de faire remarquer à ses interlocuteurs : « Tout de même, il n’est pas si fréquent qu’un parti démocratiquement élu lâche le pouvoir de sa propre initiative. » Ce qui n’est pas totalement faux !

Lorsqu’il se déplace à Tunis, le 7 février 2014, pour saluer l’adoption de la Constitution tunisienne par l’Assemblée constituante, François Hollande chante les louanges de la transition en cours devant les députés. Le discours est convenu, sans la moindre aspérité ! François Hollande renouvelle le soutien de la France au peuple tunisien, rend hommage aux martyrs de la révolution et salue l’aboutissement d’un processus semé d’embûches. « Ce texte de progrès à vocation universelle est un exemple pour les autres pays. Il consacre la démocratie participative, la nature civile de l’État, les droits des jeunes, des enfants et des femmes. » Plus approximatif, François Hollande ajoute que « l’islam est compatible avec la démocratie ». Certes, mais de quel islam s’agit-il ? Dans quel cadre, avec quelles lignes jaunes ? En fonction de quelles données historiques, géographiques, assistera-t-on à ce nouvel alliage entre l'islamisme et la démocratie ?

L’Assemblée constituante élue, le retour sur investissement ne se fait guère attendre. On ne compte pas les voyages à Doha de Ghannouchi et du président de la République, Moncef Marzougui, qui menace de poursuites judiciaires quiconque oserait s’en prendre à l’émirat. Le ministre tunisien des Affaires étrangères et gendre du Cheikh, Rafik Abdessalem Bouchlaka, un ancien employé de la chaîne qatarie Al-Jazeera, adopte les yeux fermés la feuille de route du Qatar.

Le Qatar est trop heureux de faire ses courses dans ce pays économiquement dévasté. L’émirat rachète le groupe de téléphonie Tunisiana, les palaces, les banques, les réserves de gaz de schiste… À chaque transaction, les dignitaires et ministres d’Ennahdha sont à la manœuvre. Ainsi les Qataris rachètent-ils un superbe hôtel à Tabarka, non loin de la frontière algérienne, là où Michèle Alliot-Marie, alors ministre de la Défense de Nicolas Sarkozy, avait passé de reposantes vacances de Noël en 2010, alors que des soulèvements populaires avaient éclaté dans tout le pays. Ce palace était la propriété de l’industriel Aziz Milez, aujourd’hui décédé, qui avait emmené « MAM » dans son avion pour passer quelques jours au calme et rencontrer quelques sécuritaires tunisiens. Ce grand industriel hôtelier s’était rapproché des islamistes, au point d’obtenir la libération d’un de ses amis, un ex-ministre de Ben Ali, dix jours avant sa disparition. La vente de l’hôtel de Tabarka, qui avait précédé cette faveur, a-t-elle permis de fluidifier un peu les relations entre l’industriel et le gouvernement d’Ennahdha ?

L’activisme allemand

Enfin, le relatif effacement français laisse le champ libre à l’Allemagne. Ancien porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères et diplomate expérimenté, l’ambassadeur allemand Jens Plötner, nommé en juillet 2012, se montre omniprésent, comparant la révolution tunisienne à l’écroulement du mur de Berlin. Autant de « victoires de la liberté, qui réunissent les deux pays, déclare-t-il publiquement. […] Dans ces moments magiques en 1989 au sein de l’ancienne RDA et en janvier 2011 en Tunisie, les citoyens, tout d’un coup, étaient dans la rue et ils ont senti que la peur avait changé de camp. » Et de poursuivre : « Le moment difficile que la Tunisie traverse fait partie intégrante d’une révolution. Ce sont des lendemains qui désenchantent peut-être un peu. Mais l’exemple de l’Allemagne montre qu’en persévérant, en restant concentré sur l’essentiel, on peut y arriver. » Les crédits suivent : dès 2012, un quart de milliard d’euros est octroyé par l’Allemagne à la Tunisie.

Durant la crise de l’automne 2013, où l’on vit les Occidentaux intervenir dans le processus démocratique, la France aura été infiniment moins active que les États-Unis et l’Allemagne pour écarter les islamistes du pouvoir.

Lorsque les Frères musulmans égyptiens sont évincés brutalement, le chef du mouvement islamiste Ghannouchi est sermonné par les Américains : « Si vous n’allez pas rapidement vers des élections et si vous n’adoptez pas une Constitution ouverte à la liberté de conscience et aux droits de la femme, lui disent-ils en substance, vous risquez de finir comme l’ex-président égyptien Morsi aujourd’hui emprisonné. » Dans la foulée, le Fonds monétaire international a conditionné un nouveau prêt de 500 millions de dollars à l’adoption rapide du texte constitutionnel. On voit l’ambassadeur d’Allemagne opérer un forcing considérable en faveur de la nomination du nouveau Premier ministre, Mehdi Jomaâ, dont il est fort proche.

Depuis le départ de l’ex président Ben Ali, la diplomatie française est restée constamment bienveillante à l’égard du mouvement islamiste et de son chef, Rached Ghannouchi. On verra la France applaudir des deux mains lorsque le nouveau président Beji Caïd Essebsi décide, après son élection en 2014, de gouverner avec le mouvement Ennahdha.


Dans le quatrième papier de notre série sur les islamistes tunisiens, on décrira l’alliance qui s’est nouée entre “les deux cheikhs, Beji et Ghannouchi, depuis 2015 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire